Il est au centre de tous les médias, il est beau, il a l'art de la parole et il séduit autant en France qu'outre atlantique. Lui, c'est le commandant Cousteau qui a fasciné mon enfance autour des premiers grands films documentaires dévoilant le monde sous marin, le monde du silence.
Le film récent L'Odysée magnifiquement interprété par Lambert Wilson dans le rôle de JYC alias Jean Yves Cousteau ne fait pas l'apologie naïve de ce personnage hors norme, inventeur du détendeur en plongée et explorateur de l'Antartique et de ses fonds marins sous les icebergs. La lumière bleutée et argentée de la mer, du navire d'exploration la Calypso, la lumière de son couple avec Simone au début de l'aventure, la lumière avec ses deux fils initiés très jeunes à la plongée va aussi côtoyer l'ombre. L'ombre des profondeurs marines , là où le soleil ne perce plus, l'ombre d'une vie de couple engloutie par sa passion égocentrique pour le faire valoir de ses films documentaires, l'ombre avec la mort de son fils Philippe qui sera un drame profond à tel point qu'il confie à son autre fils "' Je me sens tout seul". Longtemps, une des personnalités préférées des français, inspirateur de beaucoup de plongeurs et d'hommes de la mer, Cousteau dévoile, par ce film, au-delà de la lumière des projecteurs médiatiques, cette ombre qui a aussi coûté cher à sa vie de couple, à la relation avec ses fils et à ses proches.
Que retenir ? L'homme au petit bonnet rouge de scaphandrier ( le bonnet rouge était aussi une manière de retenir l'attention et les médias) ? L'homme qui a fait progresser de manière significative la connaissance du monde sous marin et de ses habitants ? Ou encore un homme dont l'ego a pu lui permettre d'obtenir des soutiens d'une équipe de plongeurs dévoués et de financeurs américains séduits et en même temps masquant une ombre qui va ravager femme et enfants... Lumière et ombre sont aussi nos deux facettes dans notre vie terrestre. Cette ombre, cette part de nous que nous ne voulons pas voir, rejetons et qui nous conditionne dans nos aspirations, nos désirs comme nos peurs. Et si Cousteau, dans ce personnage séduisant et irritant, nous montrait, par contraste, la voie du dépassement. Non, pas celui de chercher l'exploit à tout prix au risque de sa vie ou de celle des autres. La voie qui cherche à concilier lumière et ombre, force et fragilité, accueil du beau en soi comme des ténèbres. C'est une forme de plongée intérieure dans un autre monde du silence.