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6 septembre 2020 7 06 /09 /septembre /2020 06:14

Un bain de forêt… pour retrouver sa source.

 

A l’orée de la forêt, ce matin, Serge nous propose une pause avant d’aller plus loin : « Nous quittons un monde, le monde de kronos, du temps social pour entrer dans un autre temps, un autre monde où je vous inviterai tout à l’heure à quitter tous vos objets connectés… »

Et soudain, je prends conscience que l’expérience que je vais vivre sort de l’ordinaire de ma vie souvent pressurée par le temps, les objectifs à atteindre ou encore la recherche d’efficacité.

Oui, j’ai choisi à 60 ans et c’est un cadeau de mon épouse, Marie Claire, de vivre un bain de forêt et ce que les Japonais ont initié depuis des siècles et qu’ils nomment shinrin yoku. Durant deux jours au cœur d’une forêt avec nuit sous tente individuelle et au sein d’un groupe de sept participants venus de France et de Suisse, un guide formé à la sylvothérapie, Serge (1) va nous inviter à vivre des moments particuliers au cœur de cette forêt dont il se perçoit comme le gérant (alors qu’il en est le propriétaire !) au milieu des autres êtres vivants que sont les arbres, les plantes ou encore les animaux dont de nombreux chevreuils. Sa voix douce intérieure et sa simplicité de parole me touchent.

Symboliquement, Serge nous demande de lui confier nos objets connectés, smartphone, montre, ou encore clé de voiture qu’il glisse dans un petit sac. Il nous propose de vivre cet acte de manière consciente. C’est le point de départ avec l’invitation à formuler pour soi une intention pour ces deux jours après un temps où chacun est allé choisir un être de la forêt, arbre, arbuste, plante, ou un espace de forêt qui l’a attiré et lui a permis de se connecter à cette intention.

Plus tard, nous nous retrouvons en cercle de parole sur des couvertures posées sur la terre pour partager simplement, en confiance, chacun à notre tour, notre intention. Ce rituel du cercle de partage régulièrement proposé par Serge dans des lieux différents, sur un cercle de rondins de bois servant de chaise, une autre fois debout au milieu d’un sentier, m’est apparu comme un espace collectif miroir vraiment porteur de message pour soi, parfois délivré par les autres. Car le bain de forêt reste une expérience de dialogue avec soi-même en profondeur sans possibilité de fuir derrière l’écran d’un smartphone, d’un ordinateur, d’un journal ou d’une tâche quelconque. Ainsi, Serge, à travers ses « invitations », nous a offert cette possibilité de revenir à une relation vivante avec la forêt et ses êtres vivants à partir de nos  sens : la vue, l’ouïe, le goût, l’odorat, le toucher, la proprioception et même l’imagination.

 

Quelques morceaux choisis de ces invitations à la connexion par les sens.

Voilà notre groupe, après un petit parcours forestier, posté devant un grand et magnifique hêtre survolant ses congénères. «En silence, regardez-le , observer le depuis les racines, le tronc, le houppier, faites en le tour. Et puis, je vous invite à trouver 3 caractéristiques pour cet arbre, les vôtres. ». Tout en silence, nous sommes avec le grand hêtre droit, tacheté de blanc, majestueux. Retour au cercle de partage où chacun est invité à partager ses trois caractéristiques. Serge souligne à la fin des prises de parole que chacun a trouvé des caractéristiques différentes alors que nous avons observé le même arbre. Et avec un sourire malicieux, il nous délivre le secret de cette expérience :

« Ce que vous avez dit de l’arbre vous concerne directement. Les qualités que vous lui avez prêtées, ce sont les vôtres ! L’arbre est ainsi un miroir de votre être. » Et là, chacun de mesurer que ce simple exercice en apparence nous bouleverse déjà intérieurement.

Après une nuit sous tente où je me suis endormi rapidement, je me réveille tôt, j’ouvre ma tente et je découvre le sous-bois, les arbres, la lumière tamisée venant du ciel comme un espace familier. Une chance, il n’a pratiquement pas plu durant la nuit. Je hume l’odeur de la forêt qui s’éveille. Et soudainement, je ressens un élan à bouger, je lace rapidement mes chaussures et me lance dans un footing joyeux, léger au cœur de la forêt. L’appel de la forêt ? Je ne cherche pas à comprendre, je vis, je suis présent à l’instant.

Le soleil, après une température matinale fraîche de 12 degrés, a finalement pointé son nez. Notre guide usant de peu de mots, imprégné par la forêt nous a rappelé : « Si vous avez à choisir un chemin entre votre tête et vos pieds, choisissez de vous laisser guider par vos pieds ! ». Ce deuxième jour, nous allons vivre une expérience étonnante de land art avec une consigne simple « Choisissez collectivement un lieu dans la forêt et construisez ensemble une création constituée des éléments de la forêt que vous trouverez. » Et il rajoute le sourire en coin : « Je vous propose une contrainte supplémentaire : communiquer entre vous sans utiliser la parole ! ».

Et l’incroyable se produit. Un objet naturel se crée pas à pas dans une atmosphère de belle harmonie, chacun apportant bois, feuilles, mousse ou encore en prêtant  son objet fétiche, une belle pierre blanche .

Par un geste un peu rapide, je fais tomber un toit constitué de bois et de mousse et je me vois trouver sereinement une solution avec un long morceau de bois qu’un autre participant m’aide spontanément à bien positionner comme support de charpente. Waouh ! Et au moment du cercle de parole, j’interviens le premier pour dire « Un travail collectif vécu dans l’harmonie sans conflit et sans tension ! »  Cette réalité n’est pas si habituelle dans le monde de l’entreprise. Et Serge de donner un avis : « Quand nous sommes reliés par les gestes, le regard, nous sommes reliés par le cœur. La parole a tendance à nous reconnecter au mental, source potentielle d’incompréhension et de tension … »

Quelle heure est-il ? Aucune idée, les repères temporels restent le jour, la nuit et la beauté d’un soleil couchant sur les monts alentour. Bientôt, trop tôt, le moment est venu de clôturer le camp, cette expérience dans laquelle chacun, chacune a reçu des réponses, ou même des « cadeaux » à partir de sa quête ou de son intention du premier jour. Autour de la cérémonie du thé, avec des objet naturels posés au centre du cercle et 9 petites tasses de thé,

Serge , avec des gestes doux et conscients, nous verse le thé issu d’éléments de la forêt : aiguille du pin Douglas, feuille de ronce mûrier et de fleurs d’aubépine. Un délice pour l’odorat et le goût ! 9 tasses et nous sommes 8 ? La neuvième tasse est réservée à la Forêt qui nous a couvé pendant deux jours et une nuit.

Que retenir de cette expérience hors de la vie du quotidien ?

D’abord, j’en garde un souvenir par les sens. J’ai encore la vision du grand hêtre avec ses deux autres congénères dominant ce coin de forêt, un châtaignier trapu et un bouleau tout en finesse. La musique du handpan (2) de Gilles qui a rythmé nos temps collectifs en nous centrant sur l’écoute de ses vibrations chaudes pour l’âme. Et le toucher de cette mousse douce sur des arbres couchés et complétement enrobés. L’émotion m’a parfois submergé sans que je puisse la contrôler. Oui, baigné dans la forêt, lâchant mes compagnons numériques et mes repères habituels, j’ai redécouvert mes vraies racines. J’ai souvent revu en mémoire mes grands-parents, l’un garde forestier, l’autre débardeur vivant dans le Jura. J’ai entendu comme un message de ces ascendants : « Michel, n’oublie pas, tu as un devoir de transmettre, de partager… »

L’appel de la forêt m’a saisi. Je remercie Serge et mes sept compagnons pour cette expérience transformatrice. L’homme peut vivre sans faire tourner le moteur du mental à plein régime. Je peux vivre dans la réceptivité, la contemplation de la nature, des arbres, du sous-bois, ou encore du ciel… Et j’ai en moi gravé cette parole de Robert Greenway (3): «  Sans lien intime avec la nature, l’homme devient malade ». Aujourd’hui, j’ai le désir de compléter cette conviction que je partage par :

 L’homme, pour rester porteur de vie, de vitalité

a besoin de revenir par ses sens

régulièrement à sa source ,

 la nature avec ses êtres vivants. 

 

 

Michel BERNARD,

 coach  et formateur en transition verte…

 

Septembre 2020

 

 

  1. Site : https://entrelesarbres.com/

 

 

  1. handpan, instrument à percussion qui « chante entre ciel et terre »

http://www.easka-handpan.fr/

 

  1. Un des premiers pionniers et chercheurs américains de l’écopsychologie dans les années 60.

 

 

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  • : Le blog de Michel BERNARD
  • : ce blog est destiné à ouvrir un espace de reliance entre la psychologie positive, le coaching et le développement personnel.
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  • Michel BERNARD
  • Coach, praticien appreciative inquiry, et formateur en ressources humaines et management, j'ai à coeur de faire partager mes découvertes autour de la psychologie positive et de la pédagogie du "mieux apprendre".
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