Jeune, médaillée d'argent aux JO et un potentiel en intelligence émotionnelle
Première moisson de médailles pour la France au début de ces 30 èmes jeux olympiques à Londres. Un visage émerge, celui d'une jeune fille de 25 ans, Céline Goberville toute surprise d'avoir atteint la deuxième place de sa spécialité et récompensée par une médaille d'argent pour sa première participation aux jeux olympiques. Ce qui a attiré mon attention, c'est la manière très "self control" avec laquelle cette jeune sportive de talent a fait face à son premier direct sur un plateau de télévision.
Gracieuse, un léger sourire sur les lèvres sans exagération, le regard clair et concentré, Céline Goberville donnait l'impression de faire ce plateau de télévision comme une vieille habituée. Quelle est donc sa recette ? Je vais poser une simple hypothèse à partir des éléments de l'interview.
D'abord , elle pratique le pistolet depuis l'âge de 9 ans coachée par son père, ancien tireur de haut niveau et entraineur de niveau national. Ce sport exige trois qualités essentielles : la recherche du calme intérieur, la concentration mentale et une parfaite coordination entre le geste de tension du bras armé du pistolet, de la respiration en apnée au moment du tir et la vision de la cible. A la question du journaliste "quelle est la qualité essentielle qui vous a aidée dans ce sport pour réussir ?", sans hésitation et de manière très convaincue, Céline Goberville a répondu : " La gestion des émotions". De mon point de vue, elle donnait la clé de lecture quant à sa communication déjà très professionnelle dans un direct de télévision qui génère souvent un certain stress ou un stress certain surtout quand il s'agit d'une première fois. Cette championne a démontré sa capacité à la fois à exprimer de manière posée ses émotions, sa surprise de sa deuxième place, sa fierté pour elle, sa famille et sa discipline, et l'envie de faire partager sa joie ni excessive, ni retenue. Pour ma part, j'ai été très admiratif de cette posture toute en modération si tranchée par rapport à d'autres sportifs qui s'expriment parfois de manière hâchée sur un coup d'émotion ou avec des formules toutes préparées pour ne pas se laisser piégés par les journalistes.
Céline Oberville, pistolière comme elle se nomme elle-même dans l'interview, a fait une démonstration d'une intelligence émotionnelle dont beaucoup de sportifs de haut niveau pourraient s'inspirer.
Rappelons que ce concept mis en valeur par le psychologue américain Daniel Goleman (1) prend en considération en particulier les capacités suivantes :
- la connaissance de soi et le pouvoir de nommer ses émotions sans jugement et sans refoulement ( les nommer pour soi, c'est prendre distance avec elles)
- la capacité de les exprimer à autrui sans se laisser envahir par elles ( comme la colère) et dans le respect humain.
- la capacité d'être en empathie avec celles de nos interlocuteurs ( entendre la peur sans prendre peur pour autant !)
- la capacité à contrôler des émotions excessives pour rester dans un self control et maintenir la relation humaine.
Bravo à cette championne qui a fait la preuve en quelques minutes d'un potentiel en intelligence émotionnelle, atout majeur pour un sportif de haut niveau soumis à des pressions fortes et constantes et plus largement dans la gestion de sa vie personnelle et professionnelle.
Question subsidaire : cette intelligence émotionnelle est-elle l'héritage d'une éducation familiale ? Tous les pronostics sont ouverts quand on sait que le père est le coach direct et durable de sa fille qui éprouve un très grand respect et estime à son égard.
(1) auteur du best seller "L'intelligence émotionnelle, accepter ses émotions pour développer une intelligence nouvelle ", collection j'ai lu.
LE SILENCE POUR MIEUX S'ENTENDRE
"Un peu moins de bruit pour s'entendre beaucoup mieux", c'est le slogan qui apparait depuis le début de l'été sur certains panneaux publicitaires de la ville de Montpellier illustré par un homme qui semble être un mime et un clown à la fois.
Si ce slogan invite, avec une dose d'humour, chaque voisin à baisser d'un niveau le volume de sa chaîne hifi, de sa télévision ou encore de son instrument de musique pour éviter les querelles de voisinage surtout après l'heure fatidique des 22 heures, il m'interroge aussi sur la valeur sociale du silence.
Il y a celles et ceux qui recherchent le bruit, le bruit dans les discothèques, les concerts, le bruit pour vibrer, déchirer, se laisser hâpés tout entier par les ondes musicales. Il y a celles et ceux qui recherchent le silence d'une église ou encore d'un monastère retiré pour tenter de se retrouver soi. Et puis, il y a aussi celles et ceux vieux et jeunes qui souffrent de la solitude et qui recherchent le son d'une voix y compris par le canal de la télévision pour sortir d'un silence avec soi-même.
Silence de mort dans certains lieux professionnels aseptisés où chacun est retranché dans son bureau, silence, on tourne sur les lieux de tournage de films. Silence oppressant à l'issue d'un examen oral où le candidat attend le moindre signe d'approbation d'un jury qui se veut impartial donc froid et limitant le moindre geste verbal et non verbal.
Et puis, il existe des silences qui expriment la vie. Silence entre deux amoureux qui se rencontrent et se comprennent hors des mots. Silence d'une communauté monastique après une lithurgie où chacun se recueille dans l'église encore résonnante de leurs chants et psalmodies.
Silence que l'on convoque quand la nature évoque cet infini à travers un coucher de soleil sur la mer, un lever d'aurore sur la montagne encore embrumée, silence de contemplation qui remplit l'âme.
Aujourd'hui harcelés par une société de consommation, nous pouvons basculer entre le bruit ambiant des grandes surfaces et le désir de nous retirer pour retrouver ce silence, ce silence qui peut aussi appeler le silence intérieur, celui de l'âme.
Et si, dans ce silence là, c'est moi même que j'apprenais à mieux entendre !
Anselm Grûn, moine bénédictin allemand très reconnu par ses nombreux ouvrages (1) cherchant à relier le spirituel et le psychologique, nous ouvre une porte sur ce chemin :
"La spiritualité, c’est avoir un cœur large. En nous, il y a toutes les émotions et toutes les passions mais il y a aussi un lieu de calme, de silence, qu’il faut arriver à atteindre. Dans ce lieu, , je suis libre des jugements des autres, de leurs attentes, Aucune blessure ne peut m’atteindre, je suis sain, entier, et c’est dans ce lieu que se trouve mon moi authentique."
Et si l'été et le temps de vacances nous permettait de rechercher avec détermination ce lieu de silence, pas forcément au bout d'un chemin montagneux, au milieu de l'océan, ni même dans le silence d'un lieu spirituel, mais plus profondément en soi ?
(1) Anselm Grûn, Apprendre à faire silence; collection DDB
La faiblesse est-elle anormale ?
Socrate questionne Alexandre :
- Se sentir tributaire des autres ne te rend-il pas amer ?
- Je pense, au contraire, qu'il s'agit d'une richesse.....Mon incapacité à atteindre une parfaite autonomie me montre quotidiennement la grandeur de l'homme. Au coeur de ma faiblesse, je peux donc apprécier le cadeau de la présence de l'autre et à mon tour, j'essaie avec mes moyens de leur offrir mon humble et fragile présence.
Alexandre Jollien, devenu écrivain et philosophe a connu un parcours humain étonnant. Il passe près de 17 ans dans une institution spécialisée en Suisse en tant qu' infirme moteur cérébral, et est promis à intégrer un atelier protégé pour fabriquer des boîtes à cigares. Mais une heureuse découverte change son destin. Il se découvre une passion pour la philosophie et entreprend des études dans un milieu dit normal. Il se lie d'amitié avec le philosophe grec Socrate, un peu plus vieux que lui !
A travers son premier livre "Eloge de la faiblesse"(1), Alexandre Jollien nous questionne avec Socrate sur le sens de la faiblesse et le périmètre de la normalité . Un dialogue à la saveur rafraichissante pour l'âme humaine, jouant entre le vécu de sa vie en institution, le questionnnement socratique et des intuitions lumineuses.
A mon tour, je vais questionner Alexandre :
- Comment expliques tu, Alexandre, avoir pu échapper à ce qui était prévu pour toi après le passage en institution ?J'imagine que tes éducateurs ont du être supris quand tu as réussis des études de philosophie.
- En fin de compte, plaçé dans un contexte stimulant, je vis mes capacités se développer rapidement. Et puis, la philosophie-en tant que lutte contre les clichés, les poncifs- m'a beaucoup aidé à opposer la raison à tout ce fardeau de préjugés et de sentiments négatifs, à lutter contre l'irrationnel, la peur, la cruauté. (2)
Le témoignage d'Alexandre sur la faiblesse est éloquent. Quand il évoque, au sein de l'institution, son camarade Jérôme paralysé au fond de son lit ne sachant à peine parler qui lui dit : "Caa bva ?". Jérôme représente pour Alexandre la manière dont " le soi disant faible", non productif pour la société peut se révéler une vraie force de soutien pour d'autres.
A la fin de ce dialogue socratique dans lequel les questions sont aussi importantes que les réponses, Socrate demande à Alexandre sa définition de l'anormalité : "L'anormal est peut-être ce qui s'écarte de ce que l'on considère comme une conduite acceptable, répond Alexandre."
Socrate en vient à lui montrer que des comportements en institution n'ont rien d'anormal mais que sortis de ce contexte, ils peuvent paraitre dérangeants. La frontière entre normalité et anormalité bouge en fonction de l'endroit où je me place. Dans une société survalorisant la réussite, la compétition, le défi et celles et ceux qui, soit disant, réussissent, il est certain que le faible, la personne handicapée peut être perçue dans le hors norme, l'anormal. Cependant pour Alexandre, à travers son parcours dans lequel " les faibles" de l'institution l'ont aidé, comme il dit, à apprendre le dur "métier d'homme", le regard est tout autre.
Et laissons la dernière question à Socrate : "la faiblesse assumée peut-elle devenir féconde ?"
En tout cas, Alexandre, philosophe auteur de plusieurs ouvrages remarqués, est une réponse en lui-même.
(1) Eloge de la faiblesse, 1999. Collection Marabout.
(2) extrait de réponses données par Alexandre Jollien dans son ouvrage.
RIO DE JANEIRO, de la déception à l'espérance
- Oui, 20 ans après le sommet de Rio sur le développement durable, ce sommet de la Terre m'a déçu. Beaucoup d'Etats ont simplement confirmé des engagements antérieurs.
- Rio, pendant 3 jours ( du 20 au 22 juin 2012), ça a été le grand supermarché des grandes entreprises. Elles ont toutes voulu montrer leur étiquette d'économie verte. En fait, c'était surtout du marketing !
- En 1992, le concept de développement durable faisait rêver à un autre monde. Aujourd'hui, je me rends compte qu'il ne fait plus rêver.
- Finalement, le texte adopté par les Etats a été validé avant le sommet pour s'assurer d'un plus petit dénominateur commun et éviter que l'on colle l'étiquette d'échec à ce sommet suite à celui de Copenhague.
Chaque intervenant de cette table ronde organisée à Montpellier, capitale mondiale de la biodiversité, répondait ainsi à la première question de l'animateur : " Quelle impression personnelle avez vous suite à votre participation au sommet de Rio en juin dernier ?".
Intervenants tous spécialistes reconnus et à la parole mesurée : un responsable délégué d'un centre de recherche agronomique, un chercheur spécialiste en bilan carbone, un adjoint à la cité de Montpellier délégué sur ces questions, et un consultant en agriculture biologique.
Puis, le débat s'est ouvert avec la salle très attentive et même passionnée sur ces questions engageantes pour l'avenir de notre planète et même de la race humaine.
Et des lueurs d'espoir ont jailli du débat. Le mot clé repris par plusieurs intervenants était de revenir sur " le verre à moitié plein ou à moitié vide". Or, nous étions en fait partis du verre plutôt à moitié vide, vide par la déception, la désillusion, la frustration par rapport à des attentes . Alors, en regardant l'autre partie du verre, le verre à moitié plein, voici un petit échantillon de gouttes d'eau recueillies :
- On constate aujourd'hui autour des actions concrètes de développement durable , de protection de l'environnement, de solidarité, que ce sont les collectivités locales et la société civile qui bougent le plus. De nombreuses initiatives fleurissent comme l'idée d'une monnaie de troc locale pour éviter les spéculations des systèmes financiers.
- Ce sommet m'a permis d'établir des contacts avec des partenaires d'autres villes susceptibles de créer un réseau d'échanges de pratiques.
- Le Brésil, pays organisateur est apparu en pointe sur les questions environnementales, notamment sur les limites posées à la déforestation. Un pays qui veut s'affirmer sur la scène internationale avec l'accueil en 2014 de la coupe du monde de football et en 2016 des jeux olympiques. Nous mesurons ainsi que la France est un petit pays dans un monde où les puissances émergeantes bousculent le jeu.
Et , après plus de deux heures riches de débat qui auraient pu se prolonger toute la nuit, je suis revenu, non pas déçu mais nourri par ce passage de la déception initiale exprimée par les intervenants aux lueurs d'Espérance. Aussi, une leçon me semble intéressante à tirer de ce processus de débat. Il était sans doute nécessaire sur un plan émotionnel que chacun vide son sac avec authenticité pour ensuite permettre au débat de trouver un chemin parfois tortueux pour voir les lumières qui s'allument aux quatres coins du monde. En effet, souvent hors des projecteurs médiatiques, des organisations non gouvernementales, des villes ( émissives des 4/5 des gaz à effet de serre), des associations ou encore des pionniers sur tous les continents , hommes et femmes qui croient à un monde plus juste, solidaire soucieux de la préservation des ressources de la terre, agissent tous les jours pour les futures générations. Celles ci auront sans doute à pratiquer davantage que nous...la sobriété dans l'usage des biens.
Et si nous ajoutions nos gouttes d'eau pour continuer à remplir le verre.
La stratégie de l'écureuil, expert en rebond
Attaqué par jeu ou par ruse par deux pies qui veulent le débusquer, le petit écureuil vole de branche en branche pour leur échapper. A plus de dix mètres de haut, le spectacle qui s'offre est fascinant. L'écureuil ne semble pas en difficulté : il trouve à chaque fois une branche pour s'y aggripper, dévale le tronc , la tête à 180 degrés vers le bas puis s'élance et rebondit sur une branche. Ce qui m'épate le plus, c'est quand je vois l'écureuil oser aller jusqu'au bout d'une branche qui plie à la limite de la rupture et notre expert en rebond peut même utiliser habilement cette tension pour saisir une nouvelle branche. Osons une métaphore avec nos existences de terriens, même si l'agilité experte de l'écureuil nous dépasse.
Si j'avais à m'inspirer de l'écureuil dans une stratégie au milieu des hommes, je retiens déjà l'importance de réagir vite comme il le fait avec les pies. Dès que l'une s'approche trop près, il prend la fuite. Vous pourriez objecter que la fuite n'est pas très courageux et que les forts préféront l'affrontement, le combat et les plus malins, la négociation du territoire. Dans mon interprétation, je vois plutôt un jeu de l'écureuil narguant les deux pies : vous pourrez toujours chercher à me faire partir, je suis plus rapide, je vous échapperez quoi qu'il en soit. C'est bien là la force de l'écureuil, il montre par l'action cette certitude tranquille qu'il reste le maitre sur le territoire de l'arbre. A nous de trouver, dans nos territoires, le mouvement qui va nous protéger et nous donner une tranquille assurance.
L'écureuil prend tous les angles de progression : il grimpe, il longe une branche, il descend à 180 degrés et il progresse sur des branches souples qui bougent. Et si nous jouions de cette formidable capacité de progression. Une fois, il s'agit de persévérer vers un sommet, un objectif avec détermination, une autre fois d'avancer prudemment sur une direction et parfois, il s'agira de faire machine arrière et de descendre de nos certitudes à toute vitesse ! L'écureuil nous invite ainsi à changer notre angle de vue. Et si demain, je choisissais de me mettre tête en bas pour observer mon organisation ! Autrement dit, si je regardais plutôt les belles composantes, les talents, les solidarités réelles, les forces de vie plutôt que ce qui fait dysfonctionnement, freine ou paralyse la progression de l'ensemble.
Enfin, dernière leçon de stratégie, l'écureuil ose aller au bout d'une branche qui plie sans se rompre. Et si nous osions aller au bout de nos rêves, de nos projets même si nous pouvons ressentir la fragilité de notre support de progression.
La stratégie de l'écureuil incarne cette aptitude à rebondir en toute circonstance et cette capacité à avancer dans toute direction. Une petite branche est parfois suffisante !