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26 septembre 2010 7 26 /09 /septembre /2010 19:15

Le stage de photolecture du week-end vient de se terminer par des applaudissements collectifs autour de Thérèse de Laboulaye, formatrice française d'une méthode made in america. Participant curieux du résultat et assidu avec mon épouse, j'ai vraiment découvert une autre manière de se relier à un ouvrage pour en retirer, dans un temps souhaité, le meilleur pour soi. La photolecture, traduction française du photoreading, méthode mise au point  par l'américain Paul Scheele, est en train de faire doucement son entrée dans notre espace européen.

Et Thérèse, malgré les 17 heures de formation bien rythmées et interactives assurées durant ce week-end parisien derrière le beau musée d'Orsay, a volontiers accepté l'interview.

stage photolecture 2010 075-copie-1

 

En quoi la méthode appelée photolecture est-elle différente des méthodes de lecture rapide comme celle de Tony Buzan ?

A la différence des autres méthodes, la photolecture fait intervenir non seulement l'hémisphère gauche, spécialisé dans l'analyse, le raisonnement, le séquentiel mais également  l'hémisphère droit,qui permet une saisie globale de l'ouvrage à un niveau non conscient. Pour l'étape de la photolecture, Paul Scheele s'est inspiré de Betty Edwards auteur de Dessiner grâce au cerveau droit. Il en a déduit une autre manière radicalement nouvelle de traiter et de capter l'information écrite. Par une série de techniques appropriées, l'information peut être ramenée dans le conscient. Ainsi, le photolecteur économise du temps jusqu'à trois fois plus qu'avec une méthode traditionelle tout en retenant mieux.

 

Justement, cette étape très originale où le lecteur tourne les pages sur un rythme d'une page par seconde, qu'est ce qu'elle produit réellement ?

En fait, il ne s'agit pas à proprement parler de lecture dans cette étape . C'est plutôt une photographie mentale de l'ouvrage ou du document. A ce stade, il n'y a pas de compréhension. L'intégralité du livre est stockée dans le cerveau mais non directement accessible. L'hémisphère droit permet de créer dans le cerveau du lecteur une sorte de toile de fond sur laquelle vont venir s'accrocher ensuite en lecture consciente toutes les  connaissances tirées de l'ouvrage.

 

Qu'est ce qui vous a conduit à devenir formatrice en photolecture ?

Le point de départ se situe en Afrique. J'enseignais le français au lycée de Libreville au Gabon où j'étais responsable d'un projet lecture pour les classes de sixième. Trouvant la littérature sur le sujet trop spéculative, j'ai eu l'idée de taper reading sur internet pour voir ce qu'en disaient les anglo-saxons et je suis tombée sur le photoreading, la méthode de Paul Scheele qu'il a conçut en 1985. J'ai suivi la formation à Londres en 2003 et j'ai eu envie de devenir formatrice. Je suis partie aux Etats-Unis me former auprès de Paul Scheele. C'est quelqu'un d'étonnant : drôle, créatif. Il est sur tous les fronts. Passionné par l'apprentissage accéléré, il s'intéresse de près aux capacités non exploitées de notre cerveau et sa grande qualité, c'est sa faculté d'être là à 100%.

 

Vous avez participé récemment à la présentation (très rapide) de la méthode durant une émission de télévision, Télé matin sur France 2 et la journaliste, en commentaire, a exprimé que l'on ne savoure pas la lecture. Est-ce vraiment une méthode froide, inodore et sans saveur ?stage-photolecture-2010-076.jpg                                                     photo : une séance de brain gym pour se préparer à lire

Sur ce point, je ne suis pas d'accord avec Isabelle Martinet  car la méthode comprend un ensemble de techniques en fonction de l'objectif visé par le lecteur. Si l'objectif est de savourer le style ou encore d'acquérir un vocabulaire technique, il existe une technique qui permet de varier la vitesse et de s'arrêter sur ce qui intéresse directement le lecteur. Contrairement au titre un peu accrocheur de la traduction du livre de Paul Scheele ( lire à toute vitesse), il n'est pas interdit de prendre son temps et de savourer une oeuvre !          

 

Quand on participe à votre stage d'initiation,  vous insistez régulièrement sur la bonne préparation du cerveau pour que le lecteur se retrouve d'abord en état ressource de vigilance détendue. Vous utilisez à ce titre la formule 3-2-1, de quoi s'agit-il ?

Il s'agit effectivement que le lecteur soit dans le bon canal d'apprentissage. On n'apprend pas en état d'ondes cérébrales bêta, mais alpha.  Pour ce faire, il s'agit de se fixer un objectif concret et de fixer un point d'attention qui élargit le champ de vision. La formule 3-2-1 est un ancrage pour se mettre dans l'état propice à la photolecture. Le chiffre 3 est le déclencheur de la relaxation physique. Le chiffre 2 invite à la relaxation mentale, ici et maintenant. Au chiffre 1, le lecteur visualise une plante, un arbre ou une fleur : c'est le signal qu'il se trouve dans l'état ressource.

 

Quelle métaphore pourrait illustrer cette méthode pas comme les autres ?

Elle utilise beaucoup de métaphores aquatiques : l'eau est symbole de fluidité, de résilience, de lâcher-prise...Pour moi, la meilleure métaphore, ce sont les sports de glisse comme le surf, le patinage ou le ski hors piste. Si l'on  maintient un cap tout en lâchant prise, il s'établit une harmonie avec l'élément avec lequel on glisse et cela devient jubilatoire. Il y a dans la photolecture cette idée de glisser sans retenue le long des mots ou au travers des lignes et cela procure du plaisir.

 

Combien de livres lisez vous par mois ?

En deux ans, j'ai emprunté 282 livres à la bibliothèque de l'université. Or, j'ai droit à 6 livres à la fois et, pour les choisir, je photolis jusqu'à 15 ouvrages. J'en achète aussi pas mal et je n'ai plus de scrupules à les photolire dans les librairies pour savoir si çà vaut la peine. Il y aussi ceux que je commande sur Amazon et les PDF ou les Google books.

 

stage-photolecture-2010-080.jpgEt en tant que participant, je confirme que la méthode n'a rien de magique : elle s'appuye sur du bon sens et sur les capacités parfois oubliées de notre cerveau. Et dans cette perspective, elle invite le lecteur d'abord à répondre précisément à la question : quel est mon objectif avant de lire ce livre ? Il y a ainsi, à travers les 5 étapes de la méthode, une sélectivité progressive de l'information pour que le cerveau capte essentiellement ce qui nourrit l'objectif du lecteur. Bien sûr, et Thérèse le souligne clairement à l'issue de son stage, cet nouvel art de lire pour soi demande un apprentissage et un entraînement régulier . Chacun est invité à prendre un engagement avec lui-même. Pour ma part, j'ai choisi de photolire au moins un livre par semaine. Le pari pour l'heure est tenu !

 

Pour aller plus loin et découvrir la méthode :

 photolecture.over-blog.fr/

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11 septembre 2010 6 11 /09 /septembre /2010 19:35

INTERVIEW 2ème PARTIE

 

Suite de l'INTERVIEW DE BRUNO HOURST, pionnier du mieux apprendre en France.

 

Comment aujourd'hui, face aux difficultés d'insertion professionnelle et aussi sociale de beaucoup de jeunes, les motiver vers l'apprentissage de savoirs ?

Je verrai deux pistes à développer parmi d'autres.

D'abord, faire connaître aux jeunes l'approche des "intelligences multiples" (1), que je décris dans plusieurs de mes livres, comment " aidez son enfant à mieux apprendre", chez Eyrolles. Elle est simple à expliquer et à comprendre, et elle parle bien à l'intuition. En découvrant cette approche, bien souvent le jeune comprend que ses difficultés scolaires ( ou autres difficultés) ne viennent  pas du fait qu'il est nul, paresseux, stupide ou inadapté, mais qu'il a un "bouquet" d'intelligences" qui ne correspond pas au standard imposé, en particulier par le système scolaire. C'est un grand soulagement pour lui. J'ai rencontré des enfants pétillants d'intelligence et en même temps en échec scolaire, parce que leurs intelligences préférentielles, par lesquelles ils apprennent et communiquent avec le monde, n'étaient pas celles imposées par le système scolaire. Cela crée d'immenses souffrances et d'immenses gâchis.

8 enfants

Deuxième piste : redonner au jeune le goût d'apprendre, en lui montrant que l'on peut apprendre " autrement"  que de manière qu'il a ( souvent) subi dans son parcours scolaire. Lui faire découvrir des manières d'apprendre, de réfléchir, de travailler, de lire, de mémoriser, etc...qui correspondent mieux à sa personnalité et à ses manières personnelles de faire.

Et faire cela, ce n'est pas uniquement permettre au jeune de mieux s'intégrer dans le monde du travail : je suis persuadé que le rapport très personnel que nous entretenons au " fait d'apprendre" est directement lié à notre personnalité. Si ce rapport est bon, il y a de bonnes chances que l'enfant devienne un adulte à peu près équilibré et qu'il  ne fera pas trop de dégâts autour de lui. Si ce rapport est mauvais, il risque de tomber, une fois adulte, dans l'aigreur et le ressentiment, le conduisant à des comportements pathologiques de recherche de pouvoir, d'argent, de compulsion, de désir de se venger sur le reste du monde.

Dans les exemples extrêmes, l'enfance et le parcours scolaire d'Hitler, catastrophiques et pourtants banals, devraient nou inciter à prendre très au sérieux ce rapport à l'apprendre que nous développons chez les enfants et chez les jeunes.

 

Quel exercice pourriez-vous proposer à nos lecteurs qui veulent découvrir les jeux-cadres ?

Il faudrait rappeler ou expliquer au lecteur ce qu'est un "jeu-cadre" : une structure d'activité vide de contenu, que l'on peut " changer" quasiment complétement en terme de contenu pédagogique ou de formation. Le concept de jeu-cadre a été formalisé par une personne que j'apprécie beaucoup surnommé Thiagi (2).

 

En voici un, que j'aime bien parce qu'il fait appel aux expériences positives des participants. Il s'appelle ( les mathématiciens voudront bien m'excuser) 1=10. En voici le déroulé.

 

1=10 ou un jeu pas comme les autres !

 

Idée de base :

Sur un sujet donné, les participants recherchent un exemple personnel de situation qui a particulièrement bien réussie, et racontent cette histoire à d'autres participants.

 

Objectifs

S'appuyer sur l'expérience des participants

Déterminer les éléments généraux qui permettent de réussir

 

Exemples d'application :

Communication interpersonnelle, techniques d'animation en formation, pratique pédagogique en milieu scolaire, gestion de comportements difficiles.

 

Déroulement du jeu :

Répartir les participants en équipe de 4 à 6 personnes.

Sur le thème choisi, demander aux participants, individuellement, de se rappeler une situation dans laquelle ils ont particulièrement bien réussi.

Tout le monde se met debout, chaque participant se déplace dans la salle ( sans support pour noter) et rencontre un autre participant n'appartenant pas à son équipe, à qui il raconte son histoire et puis les rôles s'inversent : il écoute l'histoire du participant rencontré.

Changer de partenaire, lui raconter, au choix, soit sa propre histoire, soit celle que l'on vient d'entendre. Et ensuite écouter l'histoire du partenaire.

Revenir en équipe. Chacun raconte son histoire et celle (s) qu'il  a entendue(s), dans le désordre. Les autres membres de l'équipe doivent deviner quelle est la propre histoire de celui qui raconte.

Demander aux participants de déterminer en équipe les éléments-clés qui ont permis à toutes ces histoires d'arriver à une réussite.

Partager avec l'ensemble du groupe avec l'animateur.

 

Ainsi, ce jeu-cadre qui peut être adapté de mille manières, permet d'évoquer dans un temps relativement court une bonne dizaine  (ou plus ) de réussites. A partir d'elles, le groupe peut chercher les points communs et, à partir d'eux, en tirer des enseignements pour agir.

 

Celui ( ou celle) qui a la change de rencontrer Bruno HOURST, personnage atypique dans le monde de la pédagogie est souvent frappé par sa grande richesse de connaissances, lui même restant un vrai chercheur en puisant à des sources européennes comme américaines. Vous l'aurez sans doute aussi saisi à travers l'interview, c'est un homme de conviction qui veut restaurer un grand plaisir oublié au fond des cartables de beaucoup d'écoliers  : le PLAISIR D'APPRENDRE.Nuage-musique.jpg

 

 Il apparait d'ailleurs assez paradoxal de voir que les Universités du temps libre destinées en priori aux adultes et aux séniors se remplissent de plus en plus avec les plus de 60 ans, plus disponibles après une vie active et avides de découvrir des horizons intellectuels nouveaux en histoire, en psychologie, en langue, en sciences... Dernièrement, à l'occasion du départ en retraite ( mot hit parade aujourd'hui sur les médias !) d'une personne, celle-ci me confiait qu'elle voulait reprendre l'anglais, de préférence en groupe de conversation animé par des professeurs du pays et puis voyager. Et finalement l'homo sapiens dont nous descendons tous n'est-il pas , après les besoins fondamentaux du manger, du toit et de se protéger des dangers, mu par le désir d'apprendre. Apprendre l'art de créer du feu il y a des milliers d'années jusqu'à l'art, via les technologies d'information, de répondre à sa soif de mieux comprendre soi, les autres et son environnement.

 

(1) concept du chercheur américain, professeur en éducation à l'université de Harvard,  Howard Gardner qui distingue 8 formes d'intelligence :

l'intelligence logico-mathématique, l'intelligence spatiale, l'intelligence interpersonnelle, l'intelligence corporelle-kinesthésique, l'intelligence verbo-linguistique, l'intelligence intrapersonnelle, l'intelligence musicale-rythmique,  et l'intelligence naturaliste.

 

(2) pour découvrir d'autres jeux cadres, site thiagi.com

 

et puis pour découvrir tous les ouvrages de Bruno Hourst dont " au bon plaisir d'apprendre" et les formations qu'il propose notamment en direction des enseignants,

site mieux- apprendre.com

 

 

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5 septembre 2010 7 05 /09 /septembre /2010 20:08

INTERVIEW DE BRUNO HOURST : PREMIERE PARTIE

 

Il arrive à ma rencontre, dans ce petit coin perdu dans la campagne dijonnaise. Le soleil est déjà couché et je suis impressionné par la stature qui s'avance. Le ton est chaleureux et ouvert pour une première soirée d'échange au coin du feu. Quand le visage de Bruno Hourst m'apparait à la lumière, il est celui d'un homme buriné par la vie, pensez : marin, plus tard, enseignant en mathématique...puis concepteur et promoteur reconnu autour de ce qu'il appelle lui-même le mieux apprendre. L'homme est précis sur les mots, il écoute beaucoup avant de se livrer. Sa science n'est pas dans la théorie mais accouchée d'une longue expérience auprès des marins, des élèves souvent en difficulté et de recherche aux Etats Unis et en Australie.

 

D'où vient votre démarche que vous dénommez le "mieux apprendre" ?

L'approche pédagogique du "mieux apprendre" se rattache au courant anglo- saxon de l'accelerative Learning qui, elle-même, prend ses racines dans la suggestopédie développée par Georgi Lozanov. Dans les années 60, Lozanov, médecin et psychologue bulgare, s'intéresse dans le cadre de son doctorat aux phénomènes d'hypermnésie. Il se demande  si les personnes ayant des capacités de mémorisation exceptionnelle sont des individus exceptionnels ou bien, si on leur a appris  à apprendre d'une manière différente. A partir de cette recherche, Lozanov en conclut que n'importe qui peut apprendre bien plus vite que ce que notre système éducatif considère comme normal, avec une mémorisation à long terme. Repris aux Etats Unis, ces travaux vont être à l'origine de l'accelerative learning. En cherchant moi-même un équivalent  français, j'ai choisi l'expression "mieux apprendre". Et effectivement, nous savons tous apprendre mais avec cette approche, nous découvrons que nous pouvons mieux apprendre.

 

En quoi le "mieux apprendre est-il spécifique par rapport aux apprentissages traditionnels ?

L'approche du mieux-apprendre s'appuie sur un certain nombre de principes à priori de bon sens et que notre système scolaire a progressivement oublié.

Un de ces principes de base : nous apprenons tous différemment. Or vouloir faire apprendre à des enfants la même chose, de la même manière, au même âge et au même moment est une absurdité dont on voit les ravages tous les jours. Oblige-t-on tous les enfants à savoir marcher à 10 mois et 12 jours ?? Et pourtant le taux de réussite de cet apprentissage difficile est de 100% !

8 enfants

Un autre principe, c'est l'importance de l'environnement de l'apprentissage, aussi bien physique que social, émotionnel que mental.  Pour revenir au petit enfant qui apprend à marcher, lui apprend-on à marcher à coup de cours magistraux, de punitions, de contrôles, d'interro-surprise, de tensions permanentes ? Bien sûr que non. On l'encourage, on le soutient dans ses efforts, on participe à ses découvertes, on lui fait confiance et on fait confiance à ses capacités d'apprendre. Et le moment venu, il réussit.

 

Par ailleurs, beaucoup de découvertes récentes , notamment en neurosciences, confirment les intuitions du "mieux-apprendre".  Une étude américaine, conduite par des chercheurs faisant autorité, met en évidence l'importance majeure des arts et de la musique pour le développement  des capacités cognitives chez l'enfant. On en vient ainsi à l'expression d'un "apprentissage compatible cerveau" en contraste avec un apprentissage traditionnel qui ne favorise pas un fonctionnement  correct et optimal du cerveau. Rien de nouveau sous le soleil : Aristote, Pythagore, Tolstoî, et plus récemment Montessori et Freinet ont utilisé les grands principes du mieux apprendre.

Mozart-Beethov.jpg

 

 

Dispose-t'on de résultats comparatifs dans les classes scolaires entre méthode traditionnelle et "mieux apprendre" ?

Différentes études et expérimentations ont été conduites dans le monde anglo-saxon. La guggenheim School de Chicago est reconnue aujourd'hui comme une école célèbre dans le monde entier. Située dans un quartier difficile de la ville ( population noire et portoricaine), elle était à la dérive et en passe d'être fermée. Déterminée, la directrice chercha une formation nouvelle pour ses professeurs, elle fit ainsi appel à Peter Kine, spécialiste de l'integrative learning, une des formes de l'accelerative learning.

 

D'une durée de 30 heures ( une semaine) et située à l'extérieur de l'école, une formation fut  proposée aux enseignants par demi-groupe. Bien que sceptiques pour beaucoup au départ, et la directrice leur ayant laisser toute liberté d'appliquer ou non cette nouvelle méthode, ils montrèrent beaucoup d'enthousiasme à la mettre en application. L'impact sur l'école,dès la première année fut surprenant. L'absentéisme avait pratiquement disparu et le niveau en lecture et mathématique augmenta de manière spectaculaire. En deux ans, l'école passa du 16ème rang ( dernier au classement) au 2ème rang de l'académie !

D'autres conséquences plus individuelles furent constatées à travers le discours d'élèves s'étonnant : "Tiens, mes profs ont changé ! Ils sont tellement mieux maintenant ! "

En Australie, des effets comparables , avec le changement de l'environnement scolaire, furent constatés. Même si les résultats scolaires n'ont pas connu une explosion, un profond changement d'attitude s'opéra chez les enfants comme chez les enseignants. Plus de motivation, moins de problème de comportement en classe et hors classe pour les élèves et les enseignants ont trouvé plus d'harmonie dans leur vie professionnelle comme dans leur vie personnelle.

 

le premier dessin ( proposé par Bruno Hourst) illustre les 8 intelligences multiples , concept mis en lumière dans les années 1980 par le chercheur américain Howard Gardner.

 

le deuxième dessin ( proposé par Bruno Hourst) illustre avec  Mozart et Beethoven l'importance de la musique dans le soutien aux apprentissages. La musique est considérée comme l'une des  8 intelligences multiples.  

 

voir site de Bruno Hourst : mieux-apprendre.com ...en attendant la deuxième partie de l'interview !

 

 

 

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19 août 2010 4 19 /08 /août /2010 06:54

La roue avant vient de s'enliser dans des gravillons en pente, le coup de frein est donné. Trop brusque et c'est un magnifique vol plané qui m'envoie au dessus du guidon du vtt. Heureusement, le réflexe de réception sur les mains atténue le choc au sol. A peine 100 mètres de descente et c'est la chute pour quelqu'un qui n'avait pas chuté en vélo depuis une éternité.

Cette histoire est toute récente et l'auteur de la chute est l'auteur du blog. La scène se situe dans les hauteurs du jura français sur le Mont d'or à 1400 mètres d'altitude et sur une pente de vélo tout terrain ou vtt... sur le sentier dénommé du paradis ! Effectivement, le site est magnifique avec un balcon offrant un panorama large sur la chaîne des alpes et la Suisse. Cette chute m'est apparue, après le choc et la remise en selle pour une belle randonnée à travers alpages, forêts et vaches en libre pâturage, pleine d'enseignements.

D'abord la surprise, je n'imaginais pas faire une chute sur une pente raisonnable et sans difficulté apparente...sauf que mon oeil n'avait pas perçu l'amas de gravats et gravillons qui, après une journée de pluie, avait plutôt la consistance de sable mouvant. L'importance de l'observation du détail pertinent pour rester en selle et éviter la chute. Autre élément, c'est le début de la randonnée après une montée en télésiège, j'ai constaté que mon esprit n'était pas encore en pleine possession de l'engin loué pour la circonstance. Bien connaître sa " monture" et sa réaction au freinage est une nécessité avant de se lancer.

Qu'est ce que ces observations de pratiquant de vtt ont à voir avec la psychologie positive ?

Elles m'ont ramené à l'importance d'un état psychologique qualifié de vigilance détendue, celle que j'ai adoptée pour la suite (sans chute) de la randonnée. Vigilance pour anticiper la trajectoire du vélo notamment pour trouver le meilleur passage quand il y a des petits rochers qui affleurent sur le chemin ou encore des racines de sapins susceptibles d'entrainer un dérapage.

Vigilance aussi pour être prêt à poser le pied à terre si d'aventure le vélo cale dans la montée trop glissante ou trop escarpée. Mais, pour préserver le plaisir de la randonnée et goûter les senteurs forestières, les paysages ou encore les rencontres inopinées de cavaliers, il est opportun de préserver aussi la détente physique. Pas de crispation inutile sur les manettes de frein, sur les avant bras. En descente, garder autant que possible les bras souples, flottants amortissant les chocs du terrain et les mains prêtes  à donner le coup de frein au bon moment et avec la juste intensité.

Et c'est bien finalement la recherche de cet état de vigilance détendue qui, pour les spécialistes, permet la meilleure concentration de l'esprit que ce soit pour  mémoriser une lecture ou suivre un cours . Paul Scheele  (1) a même imaginé une astuce pour retrouver plus facilement le chemin de cet état hautement appréciable, évitant les chutes pour un pratiquant de vtt et évitant les dispersions de l'esprit pour les travaux intellectuels.

mandarine.jpg

 

Il s'agit d'imaginer une mandarine toute orange, toute fraîche, de la prendre dans une main puis de la faire passer plusieurs fois dans l'autre et enfin, une fois qu'elle est bien ressentie, la poser mentalement à l'arrière du  sommet du crâne. Fermez les yeux et penser à la mandarine en équilibre derrière votre tête. Les yeux fermés, respirez profondément et imaginer votre champs de vision élargi. Ouvrez les yeux et ressentez cet état de vigilance détendue alliant concentration mentale et détente physique; cela supposant aussi que votre corps soit dans une position ajustée. Des expériences conduites dans les années 80 ont montré que, pour favoriser une fixation de l'attention, le repère derrière le haut du crâne s'avérait opérationnel.

Et si le lien entre cette chute en vtt et la psychologie positive n'était  pas évident, je vous invite à relire vos chutes personnelles physiques ou symboliques et surtout à vous attarder sur les enseignements qu'elles vous délivrent. N'est ce pas par la chute répétée et répétée que chacun de nous, bébé, a appris à tenir debout sur ses deux jambes !

 

(1) auteur de la méthode de lecture active dite  photolecture, voir article sur ce blog : télévision, lecture et pédagogie : le choc des cultures.

 

 

 

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14 août 2010 6 14 /08 /août /2010 21:28

Recherchez vous, en vacances, les lieux de bruit ou les lieux de silence ?

vacances-biarritz-ete-2010-070.jpg

Question sans doute décalée. En effet, suivant les endroits et les moments de la journée :  au sein des villes, des villages, en montagne ou sur la plage en bord de lac ou de mer ,avec 3  mètres carré par personne dans certains cas, la notion de bruit est une grande variable.

Un constat, cependant, de plus en plus de vacanciers aspirent à venir fréquenter une journée, voire à faire retraite au sens spirituel du terme, au sein d'un monastère, lieu par excellence du silence, celui des moines ou moniales qui vivent chaque jour le même rituel ponctué d'offices, de prière et de travail manuel, un équilibre dans l'ora et labora ( prière et travail) , remontant au VIème siècle et inspiré de la règle de Saint Benoît.

Eux ont fait un choix,qui peut étonner,  tout entier tourné vers leur Dieu ( catholique, orthodoxe...) et ont compris depuis longtemps que le silence est la première règle pour vivre cette intimité spirituelle.

Or force est de constater que beaucoup de nos contemporains aussi aspirent, dans leur vie quotidienne,  à une forme d'intériorité, pour sortir de la superficialité d'une vie et se trouver davantage eux- mêmes... sans nécessairement se lier à un Dieu.

Le mot "intériorité" fait un chemin dans le langage courant, phénomène assez étrange dans une société de bruit, de consommation hâppée par trois syndromes en particulier : la performance à tout prix dans une culture du résultat omniprésente, l'abondance dans les choix des biens de consommation , et le culte du paraître dans son corps, dans le choix de vêtements de marque pour les jeunes, dans un style socialement acceptable en fonction des cultures professionnelles...

 

Qu'est ce que l'intériorité ?

En revenant aux pères de l'Eglise catholique et à Saint Augustin, inspirateur de la liberté intérieure avec  son fameux " Aime et fais ce que tu veux !", il considère que l'intériorité est une manière de retourner à l'intérieur de son coeur.

Mais, me direz vous, comment retourner à l'intérieur de son coeur ?

Suffit-il d'avoir été sensibilisé à l'intelligence émotionnnelle pour mieux connaitre et nommer les sentiments et les émotions qui nous traversent tout au long de nos journées ?

J'ose, à la lueur d'expériences rencontrées autour de moi par des professionnels du développement personnel comme par des engagés dans une démarche spirituelle, avancer quelques repères :

- intérioriser , c'est le contraire d'être au balcon de sa vie, noyé dans le monde, perdu dans ses pensées ou ballotté par tous les vents culturels et médiatiques environnants.

-intérioriser, c'est rechercher un centre qui nous rassure, qui nous stabilise au fond de nous mêmes. Retrouver l'essence, dirait Jung, au lieu de rester conditionné dans l'ego prisonnier de ses automatismes.

-intérioriser ,c'est retrouver un dialogue intérieur avec soi ou avec son Dieu ( pour les croyants ) et chercher des réponses à ses questions à l'intérieur de soi.

 

Enfin intérioriser, c'est se redonner une colonne vertébrale intérieure pour être moins balloté, entraîné malgré soi et influencé trop vite par les penseurs et idéologues du moment et recueillir ses propres valeurs et convictions profondes sur la vie.

Dans cette recherche d'intériorité, il y a, pour beaucoup, la nécessité de trouver autant que possible chaque jour  un espace seul avec son âme, à l'écart du bruit, chez soi, dans un lieu de silence, ou dans une pièce ou bureau paisible.

Trouver les conditions de l'intériorité représente déjà un beau défi pour beaucoup.

Celles et ceux qui ont goûté cette intériorité témoignent qu'ils ont fait l'expérience du silence intérieur, du silence arrêtant les pensées tourbillonnantes pour vivre une réelle réceptivité à l'instant présent.

Certains exercices proposés par la méthode Vittoz (1) concernant la réceptivité ( ex : faire sonner une cloche et rester attentif avec ses deux oreilles à la durée du son jusqu'à son extinction), les techniques de méditation et d'assise zen ou encore la respiration complète du yoga peuvent contribuer à apaiser le corps et le sortir du " balcon".

Cependant, l'expérience montre que l'intériorité reste un chemin très personnel. En effet,    comme une disciple sportive, elle réclame un entraînement régulier et consiste moins à l'application d'une technique méditative, corporelle ou mentale qu'à créer en soi un espace de dialogue intérieur pour toucher le coeur profond.

L'intériorité responsable est tout le contraire du christian-chemin.jpgnombrilisme d'un petit moi recroquevillé sur lui-même mais bien une démarche d'enracinement intérieur pour mieux s'ouvrir aux autres dans la diversité de leurs croyances humaines et spirituelles.

 

Certains ont choisi la marche, comme les pélerins sur les chemins de Saint Jacques de Compostelle, pour retrouver leur coeur, leur intérieur et l'habiter et le consolider. Et ils sont de plus en plus nombreux chaque été, signe des temps ?

 

Le chemin de l'intériorité ouvre, à l'image d'un arc en ciel, sur le goût de la vie ressentie, accueillie avec toutes ses couleurs et ses saveurs.

 

(1) lire article sur ce blog : une tasse de thé...pleine de révélation.

 

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20 juillet 2010 2 20 /07 /juillet /2010 21:39

Dans le monde, il existe une seule école ouverte à l'art du rire dénommé rigologie  et cette école est installée depuis quelques années en France, dans la belle citée méditerranéenne réputée d'abord pour son muscat doux, Frontignan , à une vingtaine de kilomètres de Montpellier.

Rencontre avec sa fondatrice, Corinne Cosseron , journaliste reconvertie en 2000 en rigologue et auteur de l'ouvrage " Remettre du rire dans sa vie : la rigologie , mode d'emploi" (1)

 

Quelle est la particularité de votre école ?

Elle propose des stages et des outils pour développer la joie de vivre dans tous les milieux. Ainsi, sont formés des professionnels de la santé, du social, de l'enseignement et de l'entreprise. Le rire est un magnifique outil qui crée du lien et qui permet d'aller rapidement à l'essentiel. Des stages courts et des cures de bonheur sont aussi ouverts au grand public. Les adultes qui viennent sont majoritairement des femmes à partir de 30-40 ans. A la mi-temps de la vie, on se pose des questions sur soi-même de manière plus forte. A ce jour, ont été formés dans notre école, environ 2000 animateurs de clubs de rire, 200 rigologues et une vingtaine de rigologues experts. La rigologie  est davantage un outil complémentaire qu'une profession à part entière. Un directeur de collège, un ancien ministre africain et un général presque centenaire sont venus  se former à titre personnel !

corinne-cosseron-groupe-mer.jpg

 

D'où est venue votre intuition pour créer cette école ?

C'est d'abord un exode de la vie parisienne pour trouver un autre sens  à ma vie professionnelle. Un jour, j'ai découvert sur Arte un médecin indien, Madan Kataria, qui a décidé de fermer son cabinet pour partir ouvrir des clubs de rire à travers le monde ! Cà  m'a soufflée qu'il juge le rire plus important pour les humains que tous les traitements médicaux. Du coup, j'ai franchi le pas et je me suis formée auprès de lui, "juste pour rire". Le succès du club du rire de Frontignan m'a ahurie : des gens traversaient tout le pays pour venir rire et se disaient " en manque" ! J'ai alors entrepris un tour du monde des méthodes (2) destinées à stimuler notre joie de vivre : sophrologie ludique de Colombie, coaching du rire et psychologie positive aux Etats-Unis (3), clown, humour, danse, rythmes et chant m'ont fait beaucoup voyager et rencontrer des gens plus magnifiques les uns que les autres. Mais pour tout dire, ce qui me passionne, ce n'est pas de philosopher sur le rire mais de le pratiquer, d'en faire un antidote du stress. Comme, par exemple,  la méditation du sourire intérieur ( 4) que l'on peut vivre partout, dans le métro, à un feu rouge, en poussant son caddie, ou encore à l'arrêt de bus...

 

Concernant le problème du stress au travail, en quoi la rigologie peut-elle apporter un soutien aux salariés ?

Je ne vais pas dans les entreprises pour faire diversion de manière artificielle face aux problèmes réels qu'elles rencontrent actuellement avec le stress au travail. Le rire répare point par point tout ce que les excès du stress détériorent. Par conséquent, il est vraiment efficace pour réintroduire l'humour au sein des équipes, y remettre du lien, les aider à gérer les conflits, améliorer l'ambiance de travail et donc la productivité et bien sûr lutter contre le stress. Le rire rétablit un lien vivant entre les personnes. Il fait passer le message directement par le corps et par les émotions, tous deux souvent tabous sur le lieu du travail, en court-circuitant parfois le mental. Il permet de dédramatiser, de renouer un dialogue et de mieux faire face aux inévitables changements et tensions auxquels les entreprises ont régulièrement à faire face pour rester performantes.

3FranceCorinne.jpg

 

Vous venez de publier cette année avec Frédéric Cosseron, votre mari, un cahier d'exercices pour rire davantage ( Editions Esf). Vous pensez vraiment que c'est par des exercices pratiques "d'écolier" que les personnes adultes peuvent retrouver le goût de rire ?

Oui, je le crois. Car beaucoup de gens sont conscients de rire de moins en moins et en souffrent. Mais souvent, malgré leur bonne volonté, ils "oublient" de pratiquer. Ce petit cahier permet  de s'entraîner de manière ludique, de stimuler sa joie de vivre et de penser à prendre soin de soi. Et surtout prendre soin non seulement de soi mais aussi de ceux qu'on aime car on ne rit pas tout seul dans son petit coin ! Nous savons tous à quel point nous nous sentons bien après une crise...de fou rire. Mais lorsque tout va mal dans notre vie, la première chose que l'on arrête de faire est de rire. Or le rire est un réflexe vital, destiné à nous maintenir en bonne santé, tous les jours, y compris les jours gris ou noirs. Et si le rire ne peut remplacer les larmes, il permet par contre d'évacuer le trop plein de tensions qui nous submergent parfois.

 

Quel message adressez vous aux lecteurs de ce blog ?

Le rire est une des plus jolies manières de nous aimer les uns les autres. De manière générale, sourions mille fois plus aux gens et à la vie. Nos plus beaux souvenirs sont liés à nos rires les plus sincères et tout ce qui n'est pas donné est perdu ! Alors soyons généreux et rions !

 

Corinne Cosseron n'assène pas de vérité toute faite, elle déroule, sur un ton alerte et enjoué, une expérience de vie toute en relativité. Le rire n'est pas une fin en soi, c'est un outil au service d'une plus grande cause.

 

(1) voir sur ce blog l'article " mettre du rire dans sa vie, un programme enthousiasmant"

 

(2) formation aux fondements de la psychologie positive avec Tal Ben-Shahar, à la sophrologie ludique avec Claudia Sanchez et Ricardo Lopez, au coaching du rire avec Annette Goodheart.

 

(3) voir sur ce blog articles sur Tal Ben-Shahar,le professeur  du bonheur : " apprendre le bonheur, rêve ou réalité ?" et " le rituel, une stratégie pour changer".

 

(4) voir prochain article sur ce blog

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9 juin 2010 3 09 /06 /juin /2010 22:42

14h 30, ce Dimanche, le siflet de la locomotive à vapeur pousse un cri strident et brusquement la longue cohorte des 6500 participants, pied dans pied prend du mouvement pour le départ situé dans la commune de Saint Valery. Je suis là au milieu des 6500 pour la première fois.

baie-de-somme-crotoy

Traverser la baie de Somme, un des plus bels espaces naturels d'Europe, à marée basse, c'est courir un aller-retour (1) entre la commune de Saint Valery et le Crotoy, soit environ 15 kilomètres avec un prologue dans les rues de la première commune. Ce n'est pas une course comme les autres. Elle possède des ingrédients qui , additionnés les uns aux autres , lui donne une saveur unique que certains reviennent chercher chaque année , venant des quatres coins de France et même d'Europe. Quels sont donc ces ingrédients ?

 D'abord, c'est une sucession, dès que l'on descend dans la baie, de zones de sable, de tranchées gorgées d'une espèce de boue noire, de petits filets d'eau ou encore de petites tranchées presques invisibles cachées par des herbes. Aussi, tout est art de trouver la bonne trajectoire et de poser le pied au bon endroit... dans un peloton de plus de 12 000 pieds ! Trop à droite, et on tombe sur une boue qui remonte jusqu'au genou, trop à gauche, c'est une tranchée profonde qu'il faut remonter, alors peut être au centre mais là, c'est le bouchon les uns derrière les autres et certains sont déjà enlisés jusqu'au cou. C'est donc une course où chacun, le plus souvent dans la bonne humeur, apprend à poser le pied  pour ne pas enfoncer. Et puis, en arrivant aux abords du village du Crotoy, on n'y croit pas, les concurrents devant soi ont disparu de moitié dans une vasque d'eau. Faut il nager ? Ouf, çà passe en marchant avec précaution. Mais quel soulagement et quelle fraîcheur en ressortant de ce que j'ai baptisé la baignoire.

Un peu comme les croisades, la vue porte loin et l'on observe du milieu de la baie cette longue procession multicolore très étirée vers le début. En effet , les favoris ont déjà pris leur marque et je les croise, moi arrivant près du Crotoy quand eux en reviennent. Le futur vainqueur, le burundais Willy Winduwimana , d'une allure de gazelle par sa silhouette très longiligne a déjà pris de l'avance, seul devant. L'ambiance du Crotoy est digne d'une montée de l'Alpe du Huez pour les coureurs du tour de France, le public applaudit chaleureusement les "sortants" de la Baie. Petit ravitaillement en eau et c'est le retour, vent de face. Un peu comme les coureurs cyclistes, chacun essaye de trouver le meilleur paravent, derrière un autre concurrent. Enfin, le village de Saint Valéry réapparait, une longeur de chemin de hâlage, le passage de l'écluse et c'est l'arrivée. Soulagement, joie, bonheur contagieux...Et passage obligé sous une ligne de douches de plein air car chaque participant est marqué de boue des pieds aux mains et pour certains jusqu'au visage dans lequel deux yeux émergent. Bien que beaucoup de concurrents affichent une vraie fatigue à l'arrivée, voire de la souffrance,  il règne une espèce d'enthousiasme collectif d'avoir traversé la Baie...un peu comme la traversée de la mer rouge. Comment expliquer cet état d'euphorie alors que les corps sont encore marqués du sceau de la boue ?

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Décryptage proposé :

 

1) La baie offre un vrai dépaysement, une rupture totale avec son quotidien. Des participants parisiens arrivés le matin le constataient. La baie, c'est le grand espace, c'est l'infini ouvert sur la Manche, c'est un endroit suspendu entre ciel et terre...

 

2) Tous les sens sont mobilisés : la vue pour vérifier le bon passage, la vue aussi de cette procession sans fin, l'ouîe qui capte le bruit du vent, les murmures des troupes, l'approche d'une tranchée où çà patauge, le toucher de l'eau et de la boue qui colle...Il y a une vigilance de l'instant qui décuple la présence à l'ici et maintenant. Et une odeur marine qui vous fouette le nez. Tout le reste n'existe plus.

 

3) Avez vous déjà été à l'aise dans une foule de plus de 6500 personnes ? Peut être dans un concert en vibrant collectivement pour un chanteur ou un groupe ? Mais ici, rien à voir, il y a une forme de communion invisible tissée entre ces personnes qui ne se reverront pas pour la plupart mais qui ont un but commun ce jour là : traverser la baie vaille que vaille.

 

Vous l'aurez compris, le participant que j'ai été ne peut rester froidement neutre devant ce type d'aventure sportive d'un jour. Au delà de la motivation sportive de réaliser un temps pour les uns et de tenir la distance pour les autres ou encore pour certains de goûter un "délire collectif" en s'habillant en bécassine pour la circonstance ,il y a bien autre chose. Cette autre chose, c'est ce goût incomparable par les sens d'un espace naturel sans béton, sans artifice...et avec ses inattendus.

Bon vent à la Baie et à ses organisateurs qui y ont cru dès le début.

 

(1) course  appelée transbaie crée en 1989 par une poignée de bénévoles et qui bénéficie aujourd'hui d'une aura nationale, voire européenne à tel point que les organisateurs sont obligés d'en limiter le nombre d'inscrits. Site transbaie.com

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24 mai 2010 1 24 /05 /mai /2010 22:35

Poser un regard artistique sur les objets du quotidien :

une expérience étonnante !

 

 

" S'il vous plait, quand vous présentez votre objet, éviter de justifier votre choix, entrer directement en contact avec votre objet, mettez vous en action avec lui."  Et voilà qu'un des participants de l'expérience s'avance et avec une pomme de pain la palpe dans ses mains, fait entendre sa musique, une participante se drappe avec élégance dans un châle bleu ou encore une autre prenant dans sa main une chaussure stylisée de femme, la fait bouger et marcher toute seule. De quoi s'agit-il ?

Non pas de magie noire, mais d'un atelier d'adultes, une trentaine réunis autour d'animatrices artistiques, l'une étant musicienne et l'autre comédienne à l'occasion du congrès d'une association. Théme de l'atelier : quel regard artistique posons nous sur les objets de notre quotidien ?

Moi-même participant, je fus d'abord assez déconcerté en découvrant la salle à mon arrivée : une forme de vide-grenier avec des objets les plus hétéroclites éparpillés sur le sol : du chandelier sans bougie, en passant par un vieux sac en cuir usé de voyage, des vases de taille , de couleur et de forme variés,  un livre bleu, et même une canne à l'ancienne ...

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Premier temps : chacun prend le temps d'observer puis choisit, en silence, un objet. Etonnement : sur 30 participants, pas de crise de jalousie, personne ne revendique l'objet d'un autre.

Deuxième temps : chacun est invité à se lever pour présenter aux autres l'objet choisi de préférence en le mettant en action.

Pour ma part, j'ai choisi le vieux sac en cuir qui m'inspire le voyage : je le remplit donc des objets restants au centre de la pièce puis je pars en voyage. Dans ma mémoire, je pense au cuir, au premier cartable que mon grand père m'avait offert en m'emmenant avec sa "4 chevaux" à la grande ville. Souvenir, souvenir !

Puis, chacun ayant présenté à sa manière son objet, une participante a même souflfé dans l'arrosoir comme dans un clairon, nous sommes invités à nous regrouper par trois avec nos objets pour créer une "mise en commun". Décidément, l'imagination est au pouvoir : l'un avec sa plaque de rue dénommée " rue du chêne" propose que je la cherche avec mon gros sac en cuir usé et la troisième participante avec son chandelier est là pour m'éclairer.

Et tout çà dans une fluidité étonnante. Quand c'est notre tour, je me sens très à l'aise pour jouer le voyageur perdu qui cherche sa rue, passe devant sans la voir, interpelle finalement la femme au chandelier sans bougies qui me donne l'éclairage sur la rue. Soulagement, je ne suis plus perdu, j'ai trouvé mon chemin !

Enfin, l'apothéose : le temps final où tout le groupe va déposer son objet à tour de rôle....et la magie opère : du vide grenier de départ, une forme d'harmonie se dessine dans le placement des objets. Un escarpin est même plaçé en équilibre sur un livre ouvert. Une carte de ville est posée sur le vieux sac en cuir et le châle bleu donne de la douceur à l'ensemble...

Nos animatrices nous demandent alors notre ressenti, ce que nous pensons de l'expérience.

Etonnement de la plupart des participants d'avoir réussi une " oeuvre collective spontanée" pas si mal que çà, et même esthétique selon l'avis de plusieurs. Pour le lecteur qui découvre les images de l'atelier, il pourra  lui-même être surpris car ne voyant pas forcément une grande différence entre la première image de vide-grenier et la dernière.

100_1503.jpg

Pourtant, cette expérience m'a vraiment touché par plusieurs dimensions cachées.

La première, c'est que nous n'avons pas forcément besoin de mots pour vraiment nous comprendre quand le désir est premier pour réaliser quelque chose ensemble. Le silence ( avec musique de fond) a été un soutien pour beaucoup pour vivre intérieurement l'expérience. Quel sens ?

Certains, dont je fait partie , ont reconnu que le fait que chaque objet ait été présenté et manipulé par une personnne,  lui a conféré une valeur, une saveur, une histoire et que la réalisation finale vibre de cette histoire, du fait que chaque objet renvoie à une personne, à un agir. Le sens est donc donné par l'homme qui s'approprie l'objet. Sans la main de l'homme, l'objet n'a pas de sens !

C'est alors que nous avons pris conscience, pour beaucoup, de la beauté des objets en eux mêmes , tous imprégnés de ceux qui les avaient fait vivre. Le châle tourbillonnant, le beau livre bleu relié, l'escarpin très fin en équilibre sur le livre et le chandelier très sobre à côté du sac du voyageur dont la beauté tient à l'usure de son cuir et à son naturel. Ah, si ce sac pouvait parler, il nous en raconterait des histoires..

L'expérience, au dire même de l'animatrice comédienne, l'a vraiment subjuguée par l'oser de chacun à rentrer sans  à priori dans la démarche.

Une autre réalité, plus subtile aussi peut être entendue : cet atelier, avec des membres qui ne se connaissaient pas au départ, a révélé de la confiance liée aussi à l'esprit associatif et éthique fort liant ses membres. Que donnerait la même expérience dans un cadre professionnel ?

Maintenant, je sais qu'en prenant un objet chez moi, je peux lui donner du sens, du goût . Inutile de chercher toujours plus des objets de consommation : ouvrons notre regard sur ces objets "immortels" de notre quotidien : une table, des chaises, un ornement,  des couverts, un fauteuil, un ordinateur... Posons un regard sans jugement, simplement un regard qui prend son temps. C'est aussi se relier aux objets par les sens : toucher le revêtement d'un fauteuil, sentir l'odeur du pain grillé dans le grille-pain, entendre le bruit du feu sous la poêlle. Aurions nous perdu, par conditionnement lié à notre encombrement technologique, ce regard qui voit le beau, voit les choses avec un regard neuf, et qui peut voir l'art , non seulement dans les galeries de peinture, mais chez soi en contemplant ces objets du quotidien ?

Demain,  promis, j'explore ma salle à manger et je pose mon regard " artistique " sur le premier objet qui appelle mon attention.

Et si ce regard sur les objets se déplace sur les femmes et hommes que je côtoye au quotidien. Poser un regard artistique sur l'autre, c'est peut être prendre le temps de poser ce regard en l'autre sans nécessairement y greffer une parole,  se relier, et voir ce qui se passe.

Ces constats rejoignent aussi ceux du professeur américain Mehrabian (1) qui constatait que près de 93 % de notre communication et de son impact passe par  le non verbal (  dont 55% par la posture et l'expression du visage).

 Cette expérience inhabituelle nous a sorti du langage habituel des mots, de l'argumentation pour nous faire entrer, avec l'appui du silence,  dans le paysage sensoriel, celui des sens, le toucher, l'ouie, la vue et le ressenti. Un grand spirituel  , Saint Ignace de Loyola indiquait déjà la valeur de cette voie au XVIème siècle en affirmant avec conviction dans ses exercices dits spirituels :

" Ce n'est pas d'en savoir beaucoup qui rassasie et satisfait l'âme

 

 mais de sentir et de goûter  les choses intérieurement".

  

Osons sentir, goûter...avant de parler !

 

 

(1) voir article sur ce blog : " L'empathie, une valeur qui remonte par temps de crise".

 

 

 

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22 mars 2010 1 22 /03 /mars /2010 21:46

Jacques LECOMTE, un opti-réaliste

Pionnier de la psychologie positive en France, professeur de psychologie, Jacques LECOMTE, à la suite de la conférence de présentation de l'ouvrage collectif " introduction à la psychologie positive" a répondu à nos questions. Le ton est direct, enjoué et marqué aussi d'une profonde humilité...

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Vous vous présentez non seulement comme le président de la première  et toute jeune association francophone de psychologie positive mais aussi comme un opti-réaliste.
Comme son nom l'indique, l' "opti-réalisme" est un mélange subtil d'optimisme et de réalisme. Réalisme bien entendu quant aux potentialités néfastes présentes chez l'être humain; mais optimisme également quant à ses potentialités bénéfiques envers autrui et envers lui-même. Et comme de nombreuses recherches ont montré que les personnes qui expriment généralement le meilleur d'elles-mêmes lorsqu'on leur fait confiance, je considère que c'est cette attitude de confiance qu'il faut privilégier prioritairement.

Quels sont les champs d'intervention que couvre la psychologie positive que vous situez dans le prolongement de la psychologie humaniste des années 60-70 notamment marquée par Carl Rogers ?
La psychologie positive est "l'étude des conditions et processus qui contribuent à l'épanouissement ou au fonctionnement optimal des gens, des groupes et des institutions" ( Gable et Haidt, 2005). Comme cette définition l'indique, il ne s'agit pas d'une conception égocentrique, caractérisée par la quête quasi exclusive de l'épanouissement et du développement personnel.Elle concerne également les relations interpersonnelles et les questions sociales, voire politiques. Ainsi, la psychologie positive peut tout aussi bien concerner l'épanouissement des élèves d'un collège, les bonnes relations au sein d'une équipe de travail ou encore le mode de communication entre diplomates élaborant un traité de paix.

Par rapport aux personnes au tempérament à tendance pessimiste, est ce possible à partir d'exercices de les aider à évoluer vers des émotions positives et vers l'optimisme ?
Oui, j'ai moi-même constaté cela chez des personnes. A mon sens, les deux meilleurs guides pour cela sont :
Lyubormisky S (2008) Comment être heureux...et le rester, Paris, Flammarion
Seligman M.E.P.(2008). La force de l'optimisme, Paris, InterEditions.
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A travers vos travaux sur la résilience, vous estimez qu'il n'existe pas un modèle unique de reconstruction de la personne blessée.
Au début où je me suis intéressé à ce thème, je pensais qu'il était possible de repérer une sorte de parcours standard de la résilience, en partant du temps T 0 du traumatisme, jusqu'au temps T 10 ( ou T 15 ou 20...) de la pleine résilience, avec diverses étapes intermédiaires, que le parcours de reconstruction, est généralement très différent d'une personne à l'autre. Certains vont se reconstruire surtout par l'amour conjugual ou la parentalité, d'autres par l'amitié, d'autres encore par le sport, la peinture, une conversion religieuse, une psychothérapie, etc. Il n'y a donc pas Un parcours de résilience, mais de multiples. L'étude de la résilience a été pour moi une grande école d'ouverture d'esprit.

Qu'est ce qui a déclenché chez vous ce grand désir et même, en vous écoutant, cette passion pour ce qui touche à la psychologie positive ?
Si j'essaie de m'examiner lucidement, force est de reconnaître que mon intérêt pour le bonheur vient tout simplement de ce que mon enfance et de ma jeunesse ont constitué une période particulièrement douloureuse de ma vie. Nul n'apprécie autant la lumière que celui qui en a été longtemps privé.
Comme vous l'avez souligné, j'ai consacré une partie de mes recherches ainsi que plusieurs ouvrages à la résilience (1). Je me suis tout particulièrement intéressé aux personnes ayant  été maltraitées dans leur enfance et qui sont devenues ensuite des parents affectueux. La thèse de psychologie que j'ai réalisé sur ce thème (2) m'a permis de comprendre ces personnes et, par conséquent, de mieux analyser mon propre parcours. Tout ceci n'a donc pas été fait au hasard.
Au cours de cette recherche, j'ai d'ailleurs été impressionné par l'aptitude à savoir goûter les belles choses de l'existence, manifestée par les personnes en parcours de résilience. Un autre exemple m'avait également fortement marqué des années auparavant. J'avais interviewé le philosophe Robert Misrahi, qui a consacré l'essentiel de son oeuvre au thème du bonheur. Ma première question a précisément porté sur les raisons l'ayant conduit à cette orientation.(3)

En écoutant Jacques Lecomte, vous aurez compris que :
- la psychologie positive n'est pas un nouveau nombrilisme égoîste de recherche de son petit bonheur à soi
- que c'est un domaine ouvert sur la recherche à l'échelle des individus comme des organisations.

Enfin, il est à souligner que ce courant venant d'outre-atlantique et des Etats Unis ( Seligman,...) émerge en France en même temps qu'une crise économique et sociale pour ne pas dire morale . A travers les thèmes de la résilience, de l'optimisme, du sens de la vie, comme est lointaine la sphère du business, des traders ou encore des bonus bancaires. La psychologie positive nous entraîne sur un autre chemin, celui de l'intériorité.

(1) Guérir de son enfance, Odile Jacob, 2004. Le bonheur est toujours possible, construire la résilience, Paris, Bayard, 2000 (avec Stefan Vanistendael)

(2) Briser le cycle de la violence; quand d'ex-enfants maltraités deviennent des parents non-maltraitants. Ecole pratique des Hautes Etudes, sous la direction d'Etienne Mullet, 2002. Accessibles sur le site psychologie positive ( voir lien).

(3) Entretien avec Robert Misrahi, Sciences Humaines numéro 75, août- septembre 1997, page 22.
"Ma première démarche est évidemment la recherche de la nature humaine. Mais parallèlement, il y a eu mon vécu, qui fut particulièrement difficile, puisque j'ai perdu la moitié de ma famille lors de persécutions nazis. Dans une telle situation, ou bien on se laisse couler dans le malheur et la souffrance, ou bien on réagit fortement et on tente d'aller vers quelque chose. Mais vers quoi ?
Dès lors, l'enjeu qui consiste à se demander ce qu'est l'être humain n'est pas une question abstraite, mais prend toute sa substance à partir de l'expérience; expérience du malheur certes, mais qui, à partir d'une crise, commence à dessiner un désir d'accèder à quelque chose. J'ai ainsi pris conscience qu'au coeur de la nature humaine se situe le désir, au sens large et philosophique du terme, en tant que mouvement vers l'avenir.
L'homme de désir, c'est-à-dire désir de joie. Ce n'est pas le tragique qui définit la condition humaine, mais la joie."

Pour aller plus loin, site en lien avec ce blog : psychologie positive.




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  • : Le blog de Michel BERNARD
  • : ce blog est destiné à ouvrir un espace de reliance entre la psychologie positive, le coaching et le développement personnel.
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  • Coach, praticien appreciative inquiry, et formateur en ressources humaines et management, j'ai à coeur de faire partager mes découvertes autour de la psychologie positive et de la pédagogie du "mieux apprendre".
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