Le chemin de Stevenson, un voyage vers l'essentiel.
« Je ne voyage pas pour aller quelque part mais pour voyager, je voyage pour le plaisir du voyage, l’essentiel est de bouger, d’éprouver d’un peu plus près les nécessités et les aléas de la vie… » Robert Louis Stevenson
Je viens de parcourir une bonne moitié du chemin de Stevenson (1) avec mon fils et avec la grâce d’une météo ensoleillée et d’un ciel souvent bleu. Ce qui n’est pas le lot de tous les randonneurs qui peuvent faire face couramment à des averses, du froid en altitude ou encore des coups de vent comme au sommet du mont Lozère. Je désire simplement vous partager cinq pépites sur les traces de l’écrivain écossais, Robert Louis Stevenson.
Première pépite : l’immersion sensorielle verte. Pendant une semaine, nous avons traversé des forêts de chênes, de
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châtaigniers, de pins, de hêtres, de peupliers de frênes et quelques villages isolés. Souvent, nous avions une vue panoramique constituée uniquement de collines vertes agrémentées de dentelle de genêt jaune sans l’ombre d’une moindre habitation et encore moins de béton. Et ce vert nature apaise immédiatement le mental avec une immersion de tous les sens : la vue de panoramas larges et doux en Lozère, l’ouïe avec l’écoute des oiseaux, au matin après la rosée, le senti des odeurs de sous-bois, des résines de pins et le goût…avec la fameuse confiture de châtaigne ! J’ai aussi pratiqué un exercice proposé par Lisa Garnier, (2) écologue et naturaliste : « Retenir dans sa mémoire chaque jour trois choses positives vues dans la nature ». Une manière de bonifier le soir cette immersion en revisitant le chemin menant au mont Lozère, dôme arrondi tout dégarni avec un âne au col Finiels ; la plongée sur le village du Pont de Montvert niché à son pied, ou encore la rivière rafraichissante en bas du gîte les copains à bord…
Deuxième pépite : le goûter et le ressenti dans l’instant. Dans l’inspiration du père fondateur des Jésuites, Saint Ignace de Loyola, j’ai pratiqué sa conviction profonde : « Ce n’est pas d’en savoir beaucoup qui rassasie et satisfait l’âme mais de sentir et de goûter intérieurement les choses ». Ce « goûter » se vit vraiment dans le pas à pas du marcheur chaque jour parti sur une distance d’environ 20 kilomètres. Point de recherche de performance. Traverser à gué une rivière, observer la beauté du viaduc de Mirandole tout en courbe, être accueilli par des hôtes chaleureux au gîte…Et aussi, déposer son sac à dos d’environ 10 kilos le soir, c’est goûter un bon soulagement du dos et des épaules. Cette expérience se vit avec la suppression de nos compagnons numériques : ordinateur, tablette ou smartphone. Ce dernier était activé uniquement à l’arrivé à l’étape essentiellement pour tenir au courant nos proches sans plus…
Troisième pépite : un sens, une direction tous les jours ! Avec un itinéraire repéré en avance et les réservations en gîte d’étape confirmées, chaque jour, nous savions clairement d’où nous partions et où nous devions arriver à l’issue de l’étape. Ainsi, marcher sur un itinéraire balisé avec soin en blanc et rouge ( GR 70), offrait chaque jour une direction , un cap à suivre. Inutile de chercher un Sens à nos vies durant cette semaine : il s’imposait de lui-même. Avoir ce cap journalier était très stimulant et évitait de gamberger, le cerveau envahi d’idées foisonnantes. La marche apaise et donne cette direction, colonne vertébrale du marcheur.
Quatrième pépite : l’inattendu des rencontres authentiques. Environ 18 000 personnes fréquentent chaque année le chemin de Stevenson avec une fréquentation toujours en hausse. Un couple écossais, Jimmy toujours un sourire aux lèvres et Joyce, la traductrice car professeur de français, marchaient côte à côte avec un rythme très régulier pour des personnes de plus de 70 ans. Deux copines très vivantes, Nadine et Babette qui, après le repas collectif dans notre gîte, nous ont proposé de découvrir le jeu du Punto, facile à emporter car pas plus gros qu’un jeu de cartes. Sandra partie seule et déterminée pour terminer en fin de semaine car elle reprenait son travail dès le lundi. Christophe, originaire de la région parisienne, marcheur infatigable ayant réalisé une étape de plus de 30 kilomètres, en surpression dans son travail professionnel et à la recherche d’un « second souffle » sur le chemin de Stevenson…Ian et Mike deux anglais découvreurs du chemin et bien d’autres…Un point commun à tous : nous marchons d’une étape à une autre sur le même chemin. L’étiquette professionnelle, sociale n’a plus de raison d’être. En particulier, le soir, au repas collectif au gîte d’étape, j’ai le souvenir d’échange même profond tout en restant simple parlant de nos passions sportives et culturelles jusqu’ à des sujets « plus graves » comme la crise écologique qui ne laisse personne indifférent. Et souvent l’apéritif au kir de châtaigne offert par nos hôtes avait la grande vertu de délier les langues pour tout le reste du repas.
Cinquième pépite : la générosité et la simplicité de l’âme cévenole. Pourtant cette terre a été lourdement marquée
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par les luttes sanglantes au XVIIème siècle entre protestants et catholiques suite à la décision de Louis XIV (3). Au XXIème siècle, ces épisodes sont restés dans la mémoire collective même si la cohabitation protestants catholiques est globalement une réalité pacifiée. Chaque village possède d’un côté son église souvent plus haute et d’un autre côté, son temple. Une illustration de la générosité de l’âme cévenole. Nous croisons un petit kiosque de confiture « égaré dans la nature » sans vendeur. Seul un petit écriteau signalait la procédure : choisir son produit et mettre son règlement dans une boîte en bois. Et cela fonctionne ou comment la confiance est contagieuse. Simplicité des villageois souvent heureux de voir passer des randonneurs dans un pays peu peuplé. Les hôtes des gites d’étape symbolisent bien cette générosité. Ils ont le souci de nous loger dans des chambres personnalisées comme par exemple à Pont de Montvert, cœur du voyage, où la gérante de l’auberge des cévennes a posé des panneaux de citation dans toutes les pièces de vie et les chambres. Une parmi d’autres : « On rêve trop souvent les yeux fermés, il faudrait plus souvent rêver les yeux ouverts » Mike Horn, explorateur de l’extrême.
Près de 150 ans après le voyage inaugural de Robert Louis Stevenson en 1878, j’ai vécu les yeux ouverts un retour à l’essentiel loin des médias, des outils numériques, et en connexion plus intime avec Dame Nature, mon fils et les autres marcheurs. Un retour vers l’essentiel…
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Au milieu d’un champ,
De boutons d’or, je m’assieds ;
J’observe le vent.
- Robert Louis Stevenson avec une ânesse nommée Modestine a effectué en 1878 le parcours depuis le Puy jusqu’à’ Alès. Il est devenu célèbre avec la publication de l’île au trésor et de Docteur Hyde et de Mister Jekyll. Il a été un pionnier des écrivains aventuriers du voyage et a terminé sa vie aux îles Samoa.
- Dans son ouvrage « psychologie positive et écologie. ». Actes Sud.
- Louis XIV, avec la révocation de l’édit de Nantes en 1685, a interdit aux protestants l’exercice libre de leur culte. Cependant, nombreux dans les cévennes ; ils ont résisté et organisé des célébrations cultuelles en extérieur appelées assemblées du désert. Ils vont être sévèrement condamnés et tués et en riposte, ils s’en prendront à des catholiques. Le village du Pont de Montvert préserve cette mémoire des camisards, protestants de la résistance.
Des ponts dès aujourd’hui
Des ponts dès aujourd’hui
Hier, nous avons été capables de construire des ponts
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Des ponts reliant au-dessus des cours d’eau, reliant des vallées,
Des ponts reliant un continent à une île,
Des ponts d’une longueur et d’une hauteur incroyables,
Résistants aux vents et aux tremblements de terre.
Pourtant, notre civilisation moderne a oublié
De construire des ponts, pas des ponts en béton
Des ponts entre les hommes.
Des ponts pour retisser des liens humains aimant
Au sein de familles dispersées ou divisées,
Entre Etats, au sein de pays où la violence a construit des murs
Entre ethnies, entre religions, entre races, entre partis politiques…
Des ponts qui soient robustes et durent dans le temps.
Des ponts qui passent par le regard, les gestes, les mots.
Des ponts qui chantent comme les oiseaux
Dans l’harmonie d’une clairière qui s’éveille le matin.
Des ponts chantant à l’unisson :
« Nous sommes différents et nous pouvons nous comprendre, »
« Nous sommes en désaccord et nous pouvons nous respecter »
Retrouver une présence vivante, souriante, malgré tout
Qui ouvre le dialogue, le cœur
et l’espérance vers un horizon possible ensemble.
Quand les mots ne sont plus audibles,
Accueillir simplement le silence, le silence en soi.
Le silence de communion entre tous les méditants du monde.
Le silence qui œuvre secrètement à la PAIX
Paix en soi, Paix autour de soi, Paix qui se diffuse
Comme le soleil diffuse son énergie par ses rayons.
Nous avons besoin de ponts vivants, vibrants
pour faire rayonner la Vie sur terre.
Pas pour demain, mais dès aujourd’hui.
Michel BERNARD, dans une contribution pour la Paix dans le monde.
Le codéveloppement professionnel, un espace ressource pour les managers
A l’occasion d’un interview récent de Claude Champagne pionnier du codéveloppement (1) au Québec, en amont d’une formation d’animateurs au codéveloppement que j’animais, il m’avait renvoyé la question que je lui avais posée : « Et toi, Michel, comment vois-tu les bénéfices du codéveloppement pour les managers ? ». Prenant du recul sur mon expérience de manager au sein de la fonction publique ayant participé à des groupes de codéveloppement divers et également animateur de groupes de codéveloppement, j’ai choisi mon blog pour répondre à Claude et partager largement dans le vaste réseau des codéveloppeurs.
Dans un désir de synthèse, j’ai retenu cinq bénéfices, sans prétendre être exhaustif , confirmés aussi par les managers des groupes que j’ai animés. Je me permettrai d’utiliser l’abréviation codev pour désigner le codéveloppement professionnel.
1 Le groupe de codev contribue à rompre l’isolement du manager en lui offrant un espace sécurisé d’entraide professionnelle.
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Combien de managers peuvent vraiment partager leurs préoccupations intimes dans leur environnement proche, leurs inquiétudes, avec leurs collaborateurs sans se sentir jugés, voire évalués ? Peur parfois de montrer ses fragilités dans un monde valorisant le culte de la réussite et de la performance. Or, le Codev, en offrant un espace de confiance sur un rythme mensuel leur permet avec un cadre de fonctionnement sécurisé explicité et validé ( authenticité, bienveillance, confidentialité, droit à la divergence…) de lâcher souvent un hypercontrôle pour oser dire, être avec sa tête et aussi ses émotions parfois bien cachées sous un front lisse…Au sein d’une région , les membres du groupe codev que j’animai mensuellement, composé d’une douzaine de directeurs départementaux avec des déplacements souvent de plus de 2 heures pour rejoindre la capitale régionale, étaient toujours à l’heure en manifestant leur grande motivation pour vivre cet espace singulier où tout peut se dire, où chacun peut se sentir écouté sans jugement. Et l’après-midi, ils étaient disponibles, davantage soudés… pour une réunion du comité directeur avec leur direction !
2 le groupe de codev nourrit un apprentissage d’une écoute différente, plus profonde.
Compte tenu qu’une séance de codev dure en général entre 2 à 3 heures, il n’y a aucune recherche de rapidité et de pression du temps contrairement à ce que vivent de nombreux managers dans leur course chrono quotidienne. De fait, l’animateur gère cette dimension et les participants managers, notamment dès l’étape 1 d’exposé du sujet, restent muets, écoutant pour chercher à saisir tous les éléments contextuels, spécifiques de la problématique exprimée par le client. La première fois, cette approche peut surprendre et frustrer les bavards impénitents. Ceci étant, au fil des séances, j’observe bien souvent des managers capables de retenir leur langue, d’écouter d’abord leurs voisins et de se poser avant de parler la question : « Quelle est mon intention en posant cette question à l’étape 2 ? ». Dans le cadre d’un bilan demandé à des managers d’une agence régionale de santé, je constatais qu’ils s’étaient particulièrement investis en faisant le choix du codev y compris vis-à-vis de contrainte quotidienne, parfois en raccourcissant leur pause méridienne pour être présents. Et plusieurs ont témoigné qu’ils ont changé de « mode d’écoute ». Une écoute plus attentive, moins réactive et sur le qui-vive. J’évoque pour ma part une écoute profonde qui se vit avec la tête et le cœur ouvert sur les émotions, celles du client et en résonance les siennes. Dans un espace souvent sans table en présentiel et même en visio, la proximité relationnelle induite par l’esprit codev désarme le vieux réflexe : « Je le stoppe pour dire mon objection ou mon désaccord…sans lui avoir laissé le temps d’aller au bout de sa réflexion. » Dans l’espace codev, l’écoute est d’abord centrée sur l’intention de mieux comprendre toute la subtilité de la problématique posée et la manière unique du client d’appréhender la situation évoquée. Resterait à étudier comment cette écoute ouverte, bienveillante qui prend son temps est transférée dans le quotidien du manager ou du moins dans certains contextes favorables comme le temps de l’entretien d’évaluation annuelle.
3 Le codev apprend au manager à être demandeur avec simplicité au sein d’un groupe.
Le management « à la française » dans son histoire a souvent induit le comportement d’un manager sachant, dirigeant, donnant des directives, des orientations et rarement demandeur d’une aide pour lui-même. Serait-ce un aveu de faiblesse de demander à ses collaborateurs une aide concrète sur un dossier complexe en exprimant sa difficulté à le traiter ? Dans l’étape 3 du codev, celle dans lequel le contrat est passé entre le client et les consultants, les autres participants, il y a bien nécessité que le client soit vraiment demandeur d’une aide concrète. Et le travail d’accouchement avec l’animateur de la formulation collant au mieux à ses besoins renforce la réalité d’une demande d’adulte à adultes. « Aidez-moi à trouver des pistes pour présenter ce projet xxl pour qu’il soit acceptable par les partenaires… ? Aidez-moi en me proposant des pistes d’amélioration, des retours d’expérience, des feed back sur ma manière de percevoir la situation pour améliorer le fonctionnement du collectif 007 au sein de ma structure ? ». Et chaque client de percevoir que la clarification de sa demande est un facteur…aidant et stimulant pour les consultants « aidants ». Transfert possible dans le quotidien du manager : et si je prenais le temps de formuler des vraies demandes à mes collaborateurs sans pression et avec humilité ?
4 Le groupe de codev se révèle un accélérateur d’apprentissage de gestes professionnels « terrain ».
En référence à l’ouvrage initiatique (2) des deux pionniers québécois du codéveloppement, Adrien Payette et Claude Champagne, deux convictions fortes émergent : « La pratique produit des savoirs que la science ne peut pas produire et apprendre une pratique professionnelle, c’est apprendre à agir ». Autrement dit, le groupe de codev, notamment à l’étape 4 dite de consultation, en proposant des idées, des pistes, des questionnements pratiques, des options stratégiques pour répondre à la demande du client explicite un panorama large de ce qui peut être mis en place, testé, expérimenté dans la situation évoquée par le client. Le champ de conscience, de perception du réel est élargi pour le client et en même temps pour tous les participants. Chacun nourrit ainsi une palette plus large de possibles relative à son pouvoir de discernement et corrélativement à son pouvoir d’agir.
5 Le codev offre un laboratoire pour tester sans risque un projet.
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Un exemple. A l’occasion d’un groupe de codev que j’animais au sein d’une université, un participant, directeur d’une maison de retraite, en posture de client, a demandé des suggestions, des éléments de précaution, de stratégie pour vérifier les conditions et la faisabilité d’un projet d’aromathérapie qu’il lui tenait particulièrement à cœur. Et à l’occasion de l’étape finale 6 de bilan et de partage des apprentissages, il a exprimé sa grande satisfaction d’avoir été éclairé sur des dimensions du projet qu’il avait à priori sous-estimées. Et, là, nous constatons qu’un groupe codev n’est pas un groupe d’experts sur le sujet traité, l’aromathérapie mais que l’enveloppe de confiance, d’écoute centrée sur le client lui ouvre des portes plus larges et aussi peut contribuer à booster sa motivation. Il n’est plus seul dans ce projet, il se sent soutenu discrètement par un groupe de confiance et solidaire à travers la règle fondamentale de la confidentialité. Combien de projets avortés car mal préparés, négligeant la dimension d’acceptabilité des parties engagées trainent dans les armoires des organisations ?
Le groupe codev peut ainsi jouer de manière pertinente un premier filtre permettant au porteur de projet de « tester » les conditions de sa faisabilité , sa propre motivation et les finalités au fond du projet...
Et enfin, le codev nourrit dans sa philosophie et la conviction exprimée dès l’origine par ses deux pionniers, Payette et Champagne, le co, le faire ensemble, le partage, le co apprentissage…si essentiel dans nos sociétés à tendance individualiste et consumériste.
Le groupe de codéveloppement professionnel est une approche de développement
pour des personnes qui croient pouvoir apprendre les unes des autres
afin d'améliorer leur pratique.
Bonne nouvelle pour l’administration française dans un contexte fluctuant : l’orientation donnée à la Direction Interministérielle de la Transformation Publique ( DITP) est de favoriser l’augmentation du nombre d’animateurs codev formés…pour déployer le codéveloppement professionnel dans tous les ministères et les structures publiques.
Ma conviction : plus les organisations mettront en place en leur sein des groupes de codéveloppement pour les managers , les cadres et les agents, plus les risques conflictuels, les risques de burn-out, les risques de dépression au travail seront réduits.
Le codéveloppement peut se révéler une stratégie gagnante et durable pour contribuer à une qualité de vie au travail en offrant des espaces réguliers où chacun peut se dire, se déposer, se ressourcer avec le soutien du collectif et ainsi… consolider sa posture professionnelle.
Vous en connaissez-vous des espaces de ce type au sein des milieux professionnels ?
(1) Fondé par deux québécois, Adrien Payette et Claude Champagne, le codéveloppement permet à des petits groupes de 6 à 9 personnes sans lien hiérarchique entre elles de vivre régulièrement un espace de confiance et d’entraide professionnelle en s’appuyant sur des situations concrètes apportées par les participants, https://www.youtube.com/watch?v=9cJ-FSuh3MY
(2) Ouvrage de base de 1997 : « le groupe de codéveloppement professionnel » co écrit par Adrien Payette et Claude Champagne et plus récent, « Le codéveloppement, l’intelligence collective au service de l’individu et du groupe » écrit par Claude Champagne et publié en 2021 (Editions Eyrolles)
Résister dans un monde sans boussole
Montée des populismes en Europe, guerre commerciale agressive menée par un président américain dont l’imprévisibilité interroge son irrationalité égocentrique ; des monstres numériques appelés GAFAM ( Google, Apple, Facebook devenu Meta, Amazon et Microsoft) qui nous conditionnent dans des réseaux dénommés sociaux, bref, le monde est -il en train de perdre sa boussole ? Ses valeurs de base liées à l’Etat de droit, aux démocraties respectant un minimum la liberté de pensée, de conscience et d’agir des citoyens ?
En effet, émerge de ce magma politico-économico médiatique une nouvelle forme de pensée qui pourrait se formuler ainsi. La vérité est celle que je peux clamer, déployer sur les réseaux sociaux avec certitude et même arrogance ; les médias traditionnels ne servant plus à rien ( presse quotidienne, télévisions, radios…). Je peux aussi, à l’instar d’une responsable d’un parti politique français jouer froidement, devant les médias, la victime d’un système judiciaire qui vient de la condamner à quatre ans d’emprisonnement, d’une inéligibilité de 5 ans au bout d’une instruction longue et documentée qui démasque un système organisé de détournement de fonds européens dont le préjudice est évalué à 2,9 millions d’euros par le tribunal !
Comment le simple citoyen peut-il résister à cette vague étouffant la vérité, l’Etat de droit et usant sans complexe du mensonge, de la manipulation, ou encore du rapport de forces ?
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Résister est bien souvent le premier mot qui surgit pour s’opposer à cette montée oppressante, malsaine et contagieuse du « Je peux tout dire et mentir, c’est la nouvelle loi !!! ». Oui, mais résister comment ?
Résister, c’est, de mon point de vue, chercher en priorité à préserver son esprit critique, son sens du discernement en restant connecté à des sources d’information fiables non inféodées à des lobbies ou à des puissances politiques et économiques. Citons quelques exemples parmi d’autres : Blast, , reporterre, Thinkerview ou encore des espaces médiatiques offrant des débats ouverts sans lutte de pouvoir de la parole « C ce soir » animé par Karim Rissouli sur France 5 s’inscrit dans cette philosophie avec son équipe journalistique présente discrètement au milieu des intervenants. « Débattre, c’est argumenter pour ne pas se battre » avec des idées partagées « pour éclairer l’actualité et la complexité du monde » sont cités explicitement dans la bande annonce internet de l’émission.
Résister, c’est aussi oser faire des choix qui peuvent se situer à contre-courant de cette vague déferlante évoquée en prologue de cet article.
Qui nous oblige à garder un compte sur X, Instagram, Facebook et Cie ? (1) Qu’est-ce que je perds réellement si je décide de résilier mon compte ? Evidemment, si je me situe en « influenceur », j’ai besoin d’exister sur divers réseaux sociaux, générer ma chaine You Tube et courir à la chasse aux like. Et là aussi, il y aurait à discerner qui nous faisons entrer avec discernement dans notre « cercle d’influenceurs ».
Ceci étant, résister en restant lucide sur ses propres choix de sources d’information et d’influenceurs est un premier pas.
La résistance est aussi revenir à des essentiels de la vie. En écoutant Victor Hugo déclamer « Quand je suis parmi vous, arbres de ces grands bois, dans tout ce qui m’entoure et me cache à la fois, dans votre solitude où je rentre en moi-même, je sens quelqu’un de grand qui m’écoute et qui m’aime ! »(2), à l’occasion d’un spectacle de Gospel, être touché par une chanteuse musulmane en duo côte à côte avec une chanteuse juive, contempler sans mots un vol de deux flamants roses l’un derrière l’autre dans une harmonie majestueuse au raz de l’eau. Quand je sens le vivant autour de moi qui nourris mon intériorité, oui, je peux résister.
Enfin, cet état de résistance mérite de se conjuguer au pluriel, en collectif au travers de groupes de discussion, au sein des associations, d’espaces dans lesquels la parole respecte des règles minimales d’écoute, d’authenticité, de bienveillance et d’acceptation de la divergence. Dans ce sens, les groupes de codéveloppement professionnel (3) se révèlent des lieux de co-apprentissage et aussi de préservation de cette culture qui fonde notre humanité.
- Article publié par Antoine Roche, journaliste en avril 2025
- Extrait du poème « Aux arbres » de Victor Hugo
- Fondé par deux québécois, Adrien Payette et Claude Champagne, le codéveloppement permet à des petits groupes de 6 à 9 personnes de vivre un espace de confiance et d’entraide, en s’appuyant sur des situations concrètes apportées par les participants, avec la croyance que chacun peut apprendre de l’autre. https://www.youtube.com/watch?v=9cJ-FSuh3MY
La marguerite à 5 pétales, une boussole pour l’éco-citoyen
A l’occasion de l’animation d’un atelier relatif à la transition écologique dans un quartier de Montpellier, et devant un public engagé dans la sobriété, j’ai expérimenté un outil créatif que j’ai conçu : la marguerite à 5 pétales. De quoi s’agit-il ?
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En fin d’atelier avec la prise de conscience de la nécessité collective du passage de 10 tonnes équivalent CO2 par habitant (moyenne nationale) à 2 tonnes par habitant à l’horizon 2050 (objectif de la neutralité carbone), la question de quoi faire, comment faire, pour faire plus, autrement se pose en général. Dans un cadre respectueux de chacun, sans moraliser, et sans minimiser l’enjeu d’un des plus grands défis pour notre planète terre, la marguerite propose 5 axes pour avancer avec les petits pas écologiques. Chaque pétale illustre un axe avec l'acronyme des 5 lettres QITAN…comme quittant l’ancien monde pour un autre monde ou mode de vie.
Je vous propose d’explorer les 5 pétales dans l’ordre du QITAN
Q comme se Questionner sur ses modes de consommation et ses besoins. En particulier, chacun, face à un achat, peut utiliser le triple questionnement : est-ce que j’en ai besoin ? Est-ce que j’en ai vraiment besoin ? Est-ce que j’en ai besoin maintenant ? Si la réponse est non aux trois questions, la décision à prendre semble claire.
I comme s’Informer de la matière vaste et complexe autour du réchauffement climatique, des crises liées aux ressources naturelles, aux énergies fossiles à durée limitée, ou encore en lien avec l’effondrement de la biodiversité dans une approche systémique. S’informer en étant vigilant pour ne pas se laisser conditionner par les sites trompeurs, partisans, diffuseurs d’informations fausses. Dans cette perspective, des sites non partisans et indépendants de lobbies économiques peuvent servir de ressource informationnelle fiable en donnant voix à divers points de vue. Citons parmi ceux-ci : reporterre.net, média indépendant et financé uniquement par le don de ses 2 millions de lecteurs ; bonpote.com, média crée par Thomas Wagner qui a choisi d’en faire sa mission principale avec la publication d’articles, d’interviews de spécialistes des questions d’écologie et il affiche cette indépendance (financement uniquement par des abonnés lecteurs) sur son site : « L’information est en accès libre, sans publicité, sans partenariat douteux avec Total Energies... et surtout, toutes les informations sont sourcées »
T comme Transmettre. Un enjeu important qui se vit au sein des associations engagées dans l’environnement, l’écologie, la nature, et bien d’autres et qui est aussi vécue entre parents et enfants et grands-parents et petits enfants. Pour ma part, papy d’une petite fille née en 2024, je suis attentif à une question qu’elle pourra légitimement me poser un jour : « Et toi, Papy, qu’est ce que tu as fait et fait pour préserver la planète Terre et contribuer à réduire l’empreinte carbone ? ». Nous sommes entrainés à vivre une solidarité avec les nouvelles générations.
A comme Avec. Le point de vue proposé n’est pas d’entrer dans des combats contre tel ou tel acteur politique, économique, ou autre. Le « avec » situe une volonté de partager une information, un diagnostic, pour avancer vers un projet. Ainsi sur Montpellier, l’association Culture Climat soutient activement un projet d’Académie publique du climat et des nouveaux imaginaires dans l’inspiration de l’Académie crée par la municipalité de Paris. Elle se veut un partenaire d’appui avec la métropole, les associations locales concernées et les 31 communes de ce territoire. Au niveau de chaque citoyen, il s’agit de sortir d’une quête individuelle pour entrer dans une démarche collective dans sa résidence, son quartier, son village. Jouer collectif comme nous le témoignent les équipes de sport collectif dans un esprit de cohésion contribuant à amplifier les énergies créatives…
N comme Nature. Elle est au cœur du système Terre malmené par les prédateurs qui épuisent ses ressources et la polluent sans état d’âme…Comment nous reconnecter au vivant, aux êtres vivants que sont les arbres, les plantes, les fleurs et toute la faune ? Les médiateurs ne manquent pas : animateurs de nature, guides de bain de forêt, accompagnateurs de moyenne montagne, etc…Mais la question vitale est, de mon point de vue, de préserver un lien régulier avec un espace de nature qui nous ressource pour une population française qui vit pour plus de 80 % dans des villes. Ce peut être pour ceux qui en possèdent, un jardin, pour des citadins, un jardin public comme le magnifique et premier jardin historique de France qu’est le jardin des plantes de Montpellier, ou encore un lieu de forêt, de montagne, de lac ou de mer…L’important me semble être de (re)trouver du goût à cette fréquentation et j’aime nommer pour moi-même ce lieu un espace OASIS. L’oasis symbolise le temps de la halte, de la pause pour reprendre des forces et un lieu paisible, de silence, de ressourcement.
Et maintenant, comment fonctionne la marguerite à 5 pétales en animation de groupe ?
Dans l’expérimentation de l’atelier, j’ai invité chaque participant à écrire sur un post it son petit pas écologique pour demain. Chacun est venu le lire devant le paperboard avec l’image de la marguerite. Beau moment de partage dans un silence de bienveillance. Et puis invitation à le coller sur le pétale correspondant à la « famille » du petit pas. Exemple : si mon petit pas est de revoir mes consommations (alimentation et habillement), mon post it sera collé sur le pétale Q comme se questionner. Si mon petit pas est de prendre connaissance du Plan Climat Air Energie Territorial (PCAET) de la métropole de Montpellier, je vais coller mon post it sur le pétale I comme s’informer.
Et vous, lecteur, devant les 5 pétales de la marguerite, quel est le petit pas pour lequel vous ressentez un besoin, une inspiration en solidarité avec tous et les futures générations ?
Et les petits pas ne sont pas limitatifs ! Un premier petit pas peut en entrainer un autre.
L'ESPERANCE et le morceau de chocolat
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Une fois n’est pas coutume, avant de lire la suite de cet article, je vous invite à écouter l’histoire racontée par Francine Christophe , 8 ans enfermée avec sa mère dans un camps de prisonniers en Allemagne pendant la deuxième guerre mondiale.
https://www.youtube.com/watch?v=ftugbci9ohg&t=4s
En quoi cette histoire émouvante peut convoquer l’Espérance ? De mon point de vue, je discerne plusieurs germes d’Espérance.
D’abord, le fait que la mère de Francine ne se contente pas de soutenir moralement cette femme enfermée , faible, fragile, sur le point d’accoucher mais cherche concrètement ce qu’elle peut faire pour sa survie et celle de l’enfant à naître. Le morceau de chocolat de sa fille Francine devient un symbole fort de cette Espérance en acte. Le peu qu’elles ont, elles en font don volontairement !
Sa mère espère que le morceau de chocolat va aider cette femme à retrouver un minimum de force pour accoucher…mais sans certitude sur l’avenir ! L’espérance reste un pari de confiance sur le futur !
Et la conclusion de cette histoire vraie : le bébé « muet » pendant la durée du camp a bien grandi et est devenue un médecin psychiatre ! L’Espérance peut conduire à des inattendus qui dépassent notre propre imagination. Qui aurait parié que ce bébé, qui aurait pu vivre traumatisé suite à ce vécu dans l’horreur d’un camp de concentration, devienne lui-même un soignant !
Cette histoire nous rappelle la force de l'Espérance quand nous cherchons des nouveaux repères, des nouvelles sécurités dans un monde qui surmédiatise les violences tout azimut ( guerres, violences urbaines, violence des catastrophes naturelles..).
Et William Clapier, théologien et chroniqueur à la Croix « branché » en particulier sur l’Espérance, un sujet abyssal selon lui, insiste sur le fait que l’Espérance est une vertu active, une force qui met en mouvement tout en restant lucide sur le réel du monde et de notre environnement. Dans une vision spirituelle, il invite à « accueillir ce souffle au plus profond de soi » et constate qu’elle nous réajuste à la réalité de la vie ici et maintenant.
Même si l’Espérance, dans le monde catholique, est reconnue comme une vertu théologale à côté de ses deux sœurs, la foi et la charité, elle me semble dépasser toutes les frontières au-delà des religions et au-delà des diverses philosophies de la vie.
L’Espérance mériterait d’être diffusée, transmise plus largement en particulier aux jeunes générations pour faire front à deux « maux » de notre monde fluctuant et anxiogène : le découragement et le manque de lucidité.
Pour conclure, une métaphore, celle des trois hommes dans la nuit. Trois hommes devaient traverser une grande forêt pour rejoindre un village dans la nuit. Le premier s’engage sur le chemin et entend des bruits mystérieux qui déclenchent immédiatement des peurs. Il ralentit son pas, hésite à poursuivre et se demande s’il ne devrait pas rebrousser chemin. C’est l’homme du découragement. Le deuxième avance avec un pas énergique, sûr de rejoindre rapidement le village. Il s’engage dans un chemin sinueux et ne voit pas qu’il le ramène sur ses pas. Il tourne en rond. Il passe à côté d’un chemin qui arrive au village mais ne le voit pas. C’est l’homme autocentré sur lui, croyant uniquement en son propre pouvoir…qui peut le conduire à la folie. Le troisième homme a choisi d’avancer avec un pas vigilant, à l’écoute des bruits et le regard ouvert. Il se réjouit de la pleine lune et se retrouve soudain face à deux chemins possibles. Il hésite puis levant les yeux vers le ciel, il aperçoit une petite étoile du côté d’un des deux chemins. Il choisit de s’engager sur ce chemin. Au petit matin, avec l'aube, il arrive heureux et soulagé dans le village, accueilli comme un homme de sagesse et de courage.
Et si l’Espérance nous invitait à sortir de nos peurs, de nos autosuffisances pour nous mettre à l’écoute des messages plus subtiles venant du ciel et pour oser avancer au large ?
L’Espérance a aussi deux autres sœurs : le discernement et le courage.
JOURNEE MONDIALE DE LA MEDITATION, une lumière dans la tourmente
Une première dans le monde !
En ce jour de solstice d'hiver ( le jour le plus court de l'année entre le lever et le coucher du soleil pour l'hémisphère nord), l'ONU a proclamé ce 21 décembre 2024 journée mondiale de la méditation. Waouh !
Quel sens donner à cette proclamation d'une institution internationale au delà des religions et des courants philosophiques et politiques ?
En vous invitant à lire l'article sur le site de l'ONU dédié à cette première, https://www.un.org/fr/observances/meditation-day , je me permets un commentaire libre avec le symbole de trois bougies, signes de lumière et d'espérance pour notre monde.
Première bougie
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: la méditation est reconnue comme faisant partie intégrante du patrimoine de l'humanité. Dans son article, l'ONU, en référence à des archéologues, ferait remonter l'origine de la méditation à 5000 ans. Aujourd'hui, elle estime le nombre de méditants compris entre 200 et 500 millions dans le monde.
Deuxième bougie :
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la méditation est reconnue par l'ONU comme moyen efficace pour permettre à une personne de (re) trouver un équilibre en termes de santé physique et mentale. Or, concernant la France et les problématiques de stress au travail, la santé mentale est de plus en plus souvent évoquée. La méditation offre à toute personne ce moment quotidien de pause, de ralentissement de l'activité mentale pour se ressourcer dans le goût de l'ici et maintenant.
Troisième bougie :
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dans un monde troublé par la montée des extrêmes ( guerres à l'initiative de dictateurs en souffrance pathologique; montée des mouvements populistes en Europe; radicalisation des postures de leaders politiques...) et par l'accroissement des réfugiés climatiques ou fuyant des régimes politiques sanguinaires ou encore la famine, la méditation offre humblement un espace ouvert à tous et qui peut rassembler largement au delà des religions. Elle est gratuite, elle ne demande pas de matériel coûteux ( un petit banc ou coussin). Elle peut se pratiquer seul ou en groupe.
Enfin, j'ai été très surpris de constater que l'ONU, dès 1952 ( bien avant l'émergence en Europe de la méditation de pleine conscience dans les années 2000) a crée, au sein de son siège à New York une salle de méditation appelée salle de silence. Dans quel but ? La réponse est donnée dans l'article cité :
"En favorisant la paix intérieure par la méditation, les individus contribuent à la construction d'un monde plus résilient et durable pour les générations actuelles et futures."
Et si nos institutions françaises s'en inspiraient pour retrouver un peu de dialogue apaisé au delà des désaccords de fond, des postures théâtrales au sein du palais Bourbon qui discréditent les représentants du peuple que sont les députés ? Oui, je plaide pour que notre parlement se dote d'une salle de silence ouverte à tous les députés avec des séances d'initiation à la méditation pour les volontaires.
En effet, trop de paroles, trop de mots à l'emporte-pièce, trop de bruit tapageur nuisent à l'émergence du discernement, de la réflexion partagée, de la recherche d'une conscience non partisane mais lucide autour des problématiques économiques, sociales et éthiques qui nous traversent et qui touchent les citoyens.
Qui est le plus grand enseignant du XXIème siècle ?
Vous avez cherché un nom. Pour ma part, je nommerai aujourd'hui le Silence. Le silence d'un groupe d'hommes et de femmes en méditation; le silence au cœur d'une forêt seulement troublé par les sons d'oiseaux; le silence dans un lieu spirituel quand les touristes l'ont déserté. Et le silence du spirituel qui se recueille dans sa chambre, sans tv, sans smartphone, sans rien, juste avec lui-même et son âme.
Silence des mots,
Pause,
Rien n’est dit, tout est là.
Silence des mots,
Entre terre et ciel,
Droit, Digne, mon corps immobile.
Silence des mots,
Les pensées déferlantes passent
Repassent, tout passe.
Silence des mots
Inspire…expire
J’observe mon souffle.
Silence des mots
A l’éternité, le temps est suspendu
Mon âme se repose enfin.
Silence, j’entends ton bruit
Qui m’envahit.
MARCHER, un art de vivre
Depuis plus de 300 000 ans, l’homo sapiens marche sur notre mère Terre.
Le chasseur cueilleur pouvait parcourir près de 20 kilomètres par jour.XXIème siècle, une des grandes fiertés des parents après la naissance de leur enfant : « Waouh ! Il vient de faire ses premiers pas ! »
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Il y a celles et ceux qui marchent sans le penser, sans le chercher :
Travailleurs du quotidien pour effectuer chaque jour le même trajet en rejoignant bus, tram, métro, scooter, moto ou voiture.
Il y a aussi les marcheurs en collectif pour défendre une cause sociale, politique, humanitaire ou écologique…les marcheurs de rue.
Sans oublier les marcheurs sur plusieurs jours comme les pèlerins sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle depuis le moyen âge.
Et la marche se décline de mille et une manières.
La marche aventurière comme celle de l’écrivain Sylvain Tesson sur les chemins noirs.
La marche sportive de haut niveau à l’image du nordiste Yohann Diniz lancé dans son corps émacié à plus de 14 kilomètres heure sur 50 kilomètres.
La marche nordique qui se pratique avec deux bâtons de propulsion.
La marche en raquettes qui permet de se déplacer dans des espaces enneigés
La marche de nuit pour les amateurs de ciel étoilé et d’écoute des bruits de la forêt.
La marche se révèle aussi un apprentissage pour la pleine conscience.
Le moine vietnamien Thich Nhat Hanh, homme de profonde sagesse,
Aimait à marcher très lentement en silence entouré d’adultes et d’enfants
Pour goûter tranquillement ce qui se vit dans l’instant présent.
Les guides de bain de forêt proposent des marches silencieuses pour inviter chacun
à savourer la texture du sol avec ses pieds connectés à la Terre.
Pour tous, depuis Sapiens, la marche n’a pas changé dans sa dynamique.
Elle se pratique souvent inconsciemment en trois temps de manière alternative dans la propulsion d’une jambe puis l’autre :
Premier temps, je lève la jambe depuis un appui sur le bout du pied
Deuxième temps, j’avance ma jambe
Troisième temps, je pose mon pied sur le sol par un premier contact du talon.
Amis randonneurs, amoureux de la nature.
Quand nous avons marché, grimpé à travers bois et rochers,
Sué, transpiré, ahané plusieurs heures, et que nous arrivons sur un sommet avec une vision panoramique à 360 degrés au-dessus des nuages : tout s’arrête dans le corps et dans la tête.
Nous déposons nos sacs à dos, nous refaisons nos forces et nous prenons le temps de contempler un paysage dans toute sa beauté et sa diversité.
La marche devient alors un art de vivre en trois temps :
Marcher, se poser et contempler.
Cet éloge de la marche s'adresse aussi à ces millions de randonneurs qui sillonnent dans le respect de la nature les sentiers de randonnée en France et dans le monde
...en dehors de tout "cirque médiatique" ou réseau social d'auto contemplation
La marche se suffit à elle même !
La sobriété choisie, un chemin pour transpercer la bulle de l'hyperconsommation
Depuis plus d’un mois, je fais partie de la « famille » des animateurs de l’atelier « Inventons nos vies, bas carbone » (1). J’ai accepté avec motivation de me former pour animer cet atelier de 3h 30 au sein de la fonction publique. Il a été retenu à partir d’un marché public interministériel avec l’atelier « les trois crises » pour sensibiliser les 2,5 millions de fonctionnaires de l’Etat aux enjeux de la transition écologique…d’ici décembre 2027. Démarche formative méritoire pour contribuer au plus grand défi de l’histoire de l’humanité, comme le rappelle l’astrophysicien et philosophe Aurélien Barrau.
Cet atelier conçu de manière pédagogique en low tech (sans support numérique) offre une visibilité sur l’objectif 2050 européen et français : atteindre la neutralité carbone pour rester dans la « course » de l’accord de Paris d’une augmentation limitée à moins de 2 degrés d’ici 2100 par rapport à l’ère préindustrielle ( augmentation actuelle d’environ 1,2 degré). Aujourd’hui le défi reste à relever avec des projections du GIEC allant de 2 degrés à plus 4 degrés à l’horizon 2100.
Quelle visibilité ? L’empreinte carbone moyenne d’un français est évaluée aujourd’hui autour de 10 tonnes équivalent CO2 et l’objectif 2050 est de réduire cette empreinte à moins de 2 tonnes par habitant. Que représente concrètement cette surconsommation des 10 tonnes par habitant ? En fait, elle se décompose globalement en 5 secteurs d’émission de gaz à effet de serre :
L’alimentation : 2,5 tonnes ; le transport : 2,5 tonnes ; les diverses consommations de biens ( loisirs, culture, numérique…) : 2 tonnes ; le logement : 2 tonnes…et le service public est considéré avec une valeur moyenne de 1 tonne par habitant. Première conclusion : nous devons agir sur ces 5 secteurs pour réussir le défi de la diminution à 2 tonnes par habitant. Deuxième conclusion qui est apportée par des cartes « consommation » : il y a des habitudes de consommation qui ne sont pas compatibles avec cet objectif. Deux exemples : mangez de la viande une fois par jour est équivalent à 2,2 tonnes équivalent CO2 ; un aller-retour Paris-New York (11 700 km) émet 1 tonne de CO2 et 0,8 tonnes liée au forçage radiatif additionnel ( particules azotées, traînées de condensation…) sur la base d’un avion de plus de 220 passagers, soit un total d’environ 1,8 tonnes par passager. Chacun mesure alors plus clairement « la révolution » que suppose la mise en œuvre de ces leviers de réduction de notre empreinte carbone.
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Or, notre monde occidental reste globalement « pollué » par l’hyperconsommation. Rappelons des données couramment diffusées : si tous les terriens consommaient autant que les français, il nous faudrait presque 3 planètes, comme les américains, 5 planètes et l’Inde seulement 0,7 planète. Et la moyenne mondiale reste excédentaire : 1,7 planète !
Plusieurs facteurs vont à l’encontre de l’objectif mondial, européen et français de réduction de notre empreinte carbone pour une terre habitable et désirable pour les futures générations. Le système économique mondial reste à dominante extractiviste ( 80 % de la consommation mondiale d’énergie vient des énergies fossiles, pétrole, gaz et charbon), productiviste ( toujours produire plus pour gagner plus…) et consumériste ( le big bazar des grandes surfaces alimentaires). Bien que des directives européennes et des lois françaises ont commencé à encadrer le « pillage » des ressources naturelles et réduire le gaspillage, je constate des « laisser faire contraires à l’objectif neutralité carbone », euphémisme pour éviter de parler d'une forme de déni ou d'hypocrisie de décideurs politiques et économiques. Quelques exemples parmi d’autres :
- L’énorme gaspillage agro-alimentaire de denrées consommables non périmées et embarquées dans des camions vers des méga usines de méthanisation industrielle pour destruction…comme des cookies qui n’avaient comme défaut de ne pas avoir une forme ronde !!! (2) . Les banques alimentaires, les resto du Cœur auraient apprécié de recevoir ces denrées…tenant compte de plus de 9 millions de français vivant en dessous du seuil de pauvreté.
- La publicité lumineuse au cœur de toutes les villes avec de plus en plus de panneaux avec animation vidéo malgré la loi « climat et résilience » qui vise à limiter cette publicité. Ainsi un décret précise seulement l’interdiction systématique de publicité sur mobilier urbain dans les agglomérations de moins de 10 000 habitants n’appartenant pas à une unité urbaine de plus de 100 000 habitants. Comme si les ruraux pouvaient se passer de pub mais pas les citadins !
- Les événements sportifs et culturels qui surconsomment et détruisent la biodiversité. Un exemple parmi d’autres : je terminais une randonnée avec mon fils après l’ascension du Mont Aigoual quand j’ai entendu des moteurs ronflés brisant le calme de la montagne…et en quelques mètres, je me suis retrouvé au bord d’une route avec des bolides « pollueurs » du rallye des cévennes…au sein du parc naturel des Cévennes !
Au delà de cette tension "bipolaire", une démarche volontariste de l’Etat français, de l’Europe pour « encadrer » un système extractiviste productiviste et consumériste (sans vouloir le changer) et les lobbies puissants cherchant « à gagner du temps » pour faire toujours plus de profit, il advient que de plus en plus de citoyens, jeunes et moins jeunes, font le choix conscient et volontaire d’une sobriété individuelle.
C’est, de mon point de vue, la bonne nouvelle ! Soutenu souvent par des associations tournées vers le respect de la Terre, vers le 0 déchets, la biodiversité ou encore vers des alternatives d’autres énergies décarbonées, des citoyens qui se disent éco citoyens réduisent leur consommation de viandes, leur déplacements, renoncent à prendre l’avion, et pratiquent les 5 R comme Refuser ce dont on n’a pas besoin ( ex : la pub dans la boite aux lettres), Réduire ses consommations en tout genre , Réutiliser des objets ( ex réparation de vieux meubles transformés en meuble de rangement) ou encore Recycler comme le papier et le carton, et Rendre à la Terre (avec un compost des déchets alimentaires). Ils ont aussi saisi que le bonheur est moins dans l’avoir que dans la vie des choses simples comme la marche, le lien avec la nature, ou encore l’échange de services entre voisins…
L’encyclique « Laudato Si » du Pape François publiée en 2015 en amont de la COP de Paris propose une vision éclairée de cette sobriété non contrainte par des lois : « La sobriété, qui est vécue avec liberté et de manière consciente, est libératrice…Le bonheur requiert de savoir limiter certains besoins qui nous abrutissent, en nous rendant ainsi disponibles aux multiples possibilités qu’offre la vie. » (223). Oui, le focus est bien orienté sur le discernement de nos besoins entre ceux qui nourrissent vraiment la personne dans son être et ceux qui abrutissent et rendent accros et addictifs. Dans cette recherche de lucidité et de recul, j’aime bien me poser les trois questions suivantes avant de décider un achat :
- Est-ce que j’en ai besoin ?
- Est-ce que j’en ai besoin vraiment ?
- Est-ce que j’en ai besoin maintenant ?
(1) site https://www.nosviesbascarbone.org
(2) Emission en octobre 2024 sur France 5 « Sur le front » animée par le journaliste écologiste Hugo CLEMENT
Les jeux olympiques de Paris ont-ils changé la France et les français ?
Un cheval argenté
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qui galope sur la Seine dans la nuit ; un jeune nageur Léon venu de Toulouse qui enthousiasme tout un pays en allant le plus vite sur quatre disciplines de la natation ; des athlètes qui rayonnent dans leur authenticité, leur victoire comme leur défaite ; les larmes d’émotion de Pauline Ferrand-Prevot , arrivée première et seule largement en tête de la course en VTT (photo), le long cri de détresse de la championne du monde japonaise éliminée dès son premier combat sur le tatami, tétanisée et secourue par son entraineur ; un château de Versailles et son parc transformés en plus grand lieu d’équitation majestueux au monde avec des passages le long des cours d’eau ; des images époustouflantes d’un Paris beau sous un ciel bleu, avec la vasque olympique s’élevant dans le ciel, le site de Montmartre et de sa basilique, lieu de passage des courses cyclistes, des compétitions de plein air avec la Tour Eiffel en fond d’écran et le grand palais, son escalier historique pour accueillir les meilleurs escrimeurs du monde…
Relayé largement par les télévisions, les radios, les réseaux sociaux, du 26 juillet au 11 août 2024, pendant 15 jours de jour et de nuit, la France m’a semblé oublié toutes les tracasseries vécues dans les mois précédents, de la tension sociale autour de la réforme des retraites, de la crise agricole jusqu’à la dissolution en juin de l’assemblée nationale et l’impossible majorité autour d’un président de la république en difficulté avec un gouvernement « démissionnaire » présent pour la gestion des affaires courantes. 15 jours avec une « discrétion médiatique » des élus politiques qui a permis à la France et aux français de respirer un air olympique sain et régénérateur. En cherchant à analyser la qualité de ce bon air, j’ai trouvé au moins trois composantes majeures : le retour àu Merci, à la gratitude par rapport à un français souvent qualifié de râleur, la contagion des émotions positives autour des victoires des athlètes français et un partage social de fierté de son pays, jamais l’hymne national n’aura été autant chanté durant les compétitions par les rangs de supporters joyeux et complices.
Chaque sportif français ayant décroché une médaille d’or, d’argent ou de bronze avait systématiquement un mot et bien souvent plusieurs de remerciement à son entourage, entraineur, famille et très souvent vis-à-vis d’un public soutenant. Les mots comme « ambiance incroyable du public » sont souvent revenus. Léon Marchand, le prince de ces jeux avec ses quatre défis relevés et quatre victoires en natation, disait qu’il s’était « appuyé » sur la force de ce public pour nager. Tous, à leur manière ont eu des paroles spontanées de gratitude, de reconnaissance, également pour les lieux emblématiques dans lesquels ils ont pu concourir. Et l’émotion transmise par nos champions souvent soutenus avec des pancartes avec leur visage en gros plan brandis par des supporters, s’est transmise telle une ola , une vague humaine déferlant au stade de France. Plus de 60 millions de téléspectateurs, dont j’ai fait partie, ont vibré dans cette ambiance de kermesse nationale. A souligner que les journalistes ont (pour une fois) été dans le positivisme en félicitant tous les sportifs avec leur médaille et réconfortant ceux qui étaient « passés » à côté, parfois de très peu. A tel point que les chaînes publiques ont adressé à leurs auditeurs via un courriel …des remerciements nourris d’éléments affectifs : « Ensemble, on a vibré, on a pleuré, on a célébré... » . Enfin, dans ce tourbillon quasi quotidien de célébration de nos héros qu’ils soient nageurs, judokas, cyclistes, cavaliers, tireurs, ou équipiers en sport collectif comme nos volleyeurs, j’ai pu me sentir tout d’un coup très fier d’appartenir à la France de ces champions incarnant par leur comportement, l’engagement, l'authenticité, la fraîcheur d'un parler direct, souvent teinté d'émotion, et l’exigence pour aller au bout de leurs efforts après des années d'entrainement acharné…
Aurions-nous changé, nous français, pendant ces 15 jours, traversés par cette immersion émotionnelle massive de joie, de fierté, de sublime ou encore de gratitude ? La réponse est sans doute plus complexe en fonction du degré d’ d’adhésion de chacun, de suivi de cette manifestation à caractère planétaire.
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Certes, le seuil de pauvreté en France reste au-dessus des 9 millions de personnes, encore beaucoup trop de mal logés, et le gouvernement « démissionnaire » n’est plus en capacité constitutionnelle de faire voter des projets de loi. L’urgence climatique reste une réalité prégnante à nos portes pour limiter le réchauffement ou l’emballement climatique. Bref, la France n’a pas changé en 15 jours. Mais notre regard collectif, lui, s’est réorienté vers des énergies positives qui inspirent, donnent envie, remobilisent…
Le 28 août s’ouvre la cérémonie des jeux paralympiques à Paris. Je formule le vœu que cette ferveur populaire et saine se prolonge autour de ces sportifs de haut niveau souvent résilients. Et je souhaite aussi que le slogan de l’Union européenne « Unis dans la diversité » se vive à l’occasion de ces jeux.
Gratitude de ma part à tous ces athlètes hommes et femmes, aux relais médiatiques, à la qualité des images retransmises dans le monde entier . Et si nous nous inspirions davantage quotidiennement de ces vertus olympiques pour sortir de l’esprit râleur et nous poser ces simples questions tournées vers le bon : « De quoi je peux remercier en ce jour ? De quoi je peux être fier ? Ou encore quelle image je retiens de ma journée qui m’a fait du bien ? »